Glossaire de la théorie des situations didactique de Guy Brousseau
Compilé par El Ganbour Rachid
Actant : L’actant est « ce » qui dans le modèle agit sur le milieu de façon rationnelle et économique dans le cadre des règles de la situation. En tant que modèle d’un élève ou plus généralement d’un sujet, il agit en fonction de son répertoire de connaissances.
Constructivisme radical
Le constructivisme radical est une théorie pédagogique qui affirme que l’élève ne s’approprie que les connaissances qu’il produit lui-même.
Contrat didactique.
C’est l’ensemble des obligations réciproques et des « sanctions » que chaque partenaire de la situation didactique:
– impose ou croit imposer, explicitement ou implicitement, aux autres
– et celles qu’on lui impose ou qu’il croit qu’on lui impose,à propos de la connaissance en cause.
Le contrat didactique est le résultat d’une « négociation » souvent implicite des modalités d’établissement des rapports entre un élève ou un groupe d’élèves, un certain milieu et un système éducatif.
Dévolution
Processus par lequel l’enseignant parvient dans une situation didactique à placer l’élève comme simple actant dans une situation a-didactique (à modèle non didactique). Il cherche par là à ce que l’action de l’élève ne soit produite et justifiée que par les nécessités du milieu et par ses connaissances, et non par l’interprétation des procédés didactiques du professeur. La dévolution consiste pour l’enseignant, non seulement, à proposer à l’élève une situation qui doit susciter chez lui une activité non convenue, mais aussi à faire en sorte qu’il se sente responsable de l’obtention du résultat proposé, et qu’il accepte l’idée que la solution ne dépend que de l’exercice des connaissances qu’il possède déjà.
Didactique des mathématiques
C’est la science des conditions spécifiques de la diffusion des connaissances mathématiques nécessaires aux occupations des hommes (sens large). Elle s’occupe (sens restreint) des conditions où une institution dite « enseignante » tente (mandatée au besoin par une autre institution) de modifier les connaissances d’une autre dite « enseignée » alors que cette dernière n’est pas en mesure de le faire de façon autonome et n’en ressent pas nécessairement le besoin.
Effet « Diènes »
Plus le professeur se croit assuré de la réussite par les effets d’un dispositif ou d’un matériel didactiques et de « lois » psychologiques ou autres, indépendantes de son investissement personnel, et plus il risque d’échouer… !
Nous appelons effet Diénès ce phénomène en référence à une étude portant sur la diffusion des mathématiques modernes dans l’enseignement obligatoire suivant une méthode proposée par Zoltan Diènes. L’existence de cet effet montre la nécessité d’intégrer les rapports maître-élève dans toute théorie didactique.
Effet Jourdain
Ainsi nommé par référence à la scène du « Bourgeois Gentilhomme » où le maître de philosophie révèle à Jourdain ce que sont la prose ou les voyelles. Tout le comique de la scène est basé sur le ridicule de cette sacralisation répétée d’activités familières dans un discours savant. Le professeur, pour éviter le débat de connaissance avec l’élève et éventuellement le constat d’échec, admet de reconnaître l’indice d’une connaissance savante dans les comportements ou dans les réponses de l’élève, bien qu’elles soient en fait motivées par des causes et des significations banales. C’est une forme d’effet Topaze
Effet Topaze
La première scène du célèbre « Topaze » de Marcel Pagnol illustre un des processus fondamentaux dans le contrôle de l’incertitude: le maître fait une dictée à un mauvais élève; ne pouvant pas accepter trop d’erreurs trop grossières et ne pouvant pas non plus donner directement l’orthographe demandée, il « suggère » la réponse en la dissimulant sous des codages didactiques de plus en plus transparents. Le problème est complètement changé, l’enseignant mendie une marque d’adhésion et négocie à la baisse les conditions dans lesquelles l’élève finira par donner la réponse attendue, le professeur a fini par prendre à sa charge l’essentiel du travail. La réponse que doit donner l’élève est déterminée à l’avance, le maître choisit les questions auxquelles cette réponse peut être donnée.
Glissements métacognitif et méta-didactique
Le glissement métacognitif est le remplacement d’une connaissance par un de ses modèles par une description en métalangage. Le glissement méta-didactique est le processus didactique qui conduit à l’utilisation didactique effrénée du glissement métacognitif. Lorsqu’une activité d’enseignement a échoué, le professeur peut être conduit à se justifier et, pour continuer son action, à prendre ses propres explications et ses moyens heuristiques comme objets d’étude à la place de la véritable connaissance mathématique.
Milieu
Le milieu est le système antagoniste de l’actant. Dans une situation d’action, on appelle « milieu » tout ce qui agit sur l’élève ou / et ce sur quoi l’élève agit.
Modèle implicite
Modèle implicite d’action : C’est d’abord une description systématique aussi simple que possible des comportements d’un actant dans une situation. On l’appellera stratégie (valable pour tous les cas) ou tactique (pour certains seulement). Ce modèle peut être utilisé pour tenter de prévoir les comportements effectifs d’un sujet, mais il est construit par l’observateur d’après des critères objectifs, que le sujet observé ait conscience ou non de ce qu’il fait et qu’il soit capable de l’expliciter ou non.
Obstacles
Un obstacle est un ensemble de difficultés d’un actant (sujet ou institution), liées à « sa »conception d’une notion.
Les obstacles d’origine ontogéniquesont ceux qui surviennent du fait des limitations (neurophysiologiques entre autres) du sujet à un moment de son développement: il développe des connaissances appropriées à ses moyens et à ses buts à cet âge là.
Les obstacles d’origine didactiquesont ceux qui semblent ne dépendre que d’un choix ou d’un projet du système éducatif.
Les obstacles d’origine épistémologiquesont ceux auxquels on ne peut, ni ne doit échapper, du fait même de leur rôle constitutif dans la connaissance visée. On peut les retrouver dans l’histoire des concepts eux-mêmes.
Paradoxe du comédien
Diderot a formulé dans une étude célèbre le paradoxe inhérent à l’activité du comédien : Plus l’acteur éprouve les émotions qu’il veut présenter, moins il est capable de les faire éprouver au sectateur car « observateur continu des effets qu’il produit, l’acteur devient en quelque sort spectateur des spectateurs en même temps qu’il l’est de lui-même et peut ainsi perfectionner son jeu ». Ce paradoxe se prolonge au cas du professeur. S’il produit lui-même ses questions et ses réponses de mathématiques, il prive l’élève de la possibilité d’agir. Il doit donc laisser du temps, laisser des questions sans réponses, utiliser celles que l’élève lui donne et les intégrer dans sa propre démarche en leur laissant une place de plus en plus grande…
Paradoxe de la dévolution des situations
Le professeur a l’obligation sociale d’enseigner tout ce qui est nécessaire à propos du savoir. L’élève – surtout lorsqu’il est en échec – le lui demande. Ainsi donc, plus le professeur cède à ces demandes et dévoile ce qu’il désire, plus il dit précisément à l’élève ce que celui-ci doit faire, plus il risque de perdre ses chances d’obtenir et de constater objectivement l’apprentissage qu’il doit viser en réalité. C’est le premier paradoxe : ce n’est pas tout à fait une contradiction, mais le savoir et le projet d’enseigner vont devoir s’avancer sous un masque. Ce contrat didactique met donc le professeur devant une véritable injonction paradoxale : tout ce qu’il entreprend pour faire produire par l’élève les comportements qu’il attend, tend à priver ce dernier des conditions nécessaires à la compréhension et à l’apprentissage de la notion visée.
Situation (mathématique)
Les conditions d’une des utilisations particulières d’une connaissance mathématique sont considérées comme formant un système appelé « situation ».
Une situation est d’une part, un jeu hypothétique (qui peut être défini mathématiquement), qui explicite un système minimal de conditions nécessaires dans lesquelles une connaissance (mathématique) déterminée, peut se manifester par les décisions aux effets observables (des actions) d’un actant sur un milieu.
D’autre part, un modèle du type ci-dessus, destiné à interpréter la partie des décisions observables d’un sujet réel qui relèvent de son rapport à une connaissance mathématique déterminée.
Situation (a-didactique) d’action (relative à une connaissance)
C’est une situation où la connaissance du sujet se manifeste seulement par des décisions, par des actions régulières et efficaces sur le milieu et où il est sans importance pour l’évolution des interactions avec le milieu que l’actant puisse ou non identifier, expliciter ou expliquer la connaissance nécessaire.
Situation (a-didactique) de formulation (d’une connaissance)
C’est une situation qui met en rapport au moins deux actants avec un milieu. Leur succès commun exige que l’un formule la connaissance en question (sous une forme quelconque) à l’intention de l’autre qui en a besoin pour la convertir en décision efficace sur le milieu. La formulation consiste pour ce couple d’actants à utiliser un répertoire connu pour formuler un message original, mais la situation peut conduire à modifier ce répertoire.
Situation (a-didactique) de validation (sociale et culturelle)
Une situation de validation est une situation dont la solution exige que les actants établissent ensemble la validité de la connaissance caractéristique de cette situation. Sa réalisation effective dépend donc aussi de la capacité des protagonistes d’établir ensemble explicitementcette validité.
Situation fondamentale (correspondant à un savoir)
C’est un schéma de situation capable d’engendrer par le jeu des variables didactiques qui la déterminent, l’ensemble des situations correspondant à un savoir déterminé.
Situation d’institutionnalisation d’une connaissance
C’est une situation qui se dénoue par le passage d’une connaissance de son rôle de moyen de résolution d’une situation d’action, de formulation ou de preuve, à un nouveau rôle, celui de référence pour des utilisations futures, personnelles ou collectives.
Théorie des situations didactiques en mathématiques
La théorie des situations comporte deux objectifs, d’une part l’étude de la consistance des objets et de leurs propriétés (logiques, mathématiques, ergonomiques), nécessaires à la construction logique et à l’invention de «situations », et d’autre part la confrontation scientifique (empirique ou expérimentale) de l’adaptation de ces modèles et de leurs caractéristiques avec la contingence.
Usage abusif de l’analogie
C’est un procédé didactique qui utilise l’analogie comme argument pour faire admettre et apprendre une connaissance par l’accumulation de circonstances «analogues ».L’analogie est un excellent moyen heuristique lorsqu’elle est utilisée sous la responsabilité de celui qui en fait usage. Mais son utilisation dans la relation didactique en fait un redoutable moyen de produire des effets « Topaze ».
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