LA CONSTITUTION 2011 ENTRE LE VERNIS ET L’ÉPICERIE
COLONEL MOHAMED MELLOUKI
JOURNAL – LA 2ème LECTURE
JOURNAL – LA 2ème LECTURE
LA CONSTITUTION 2011 ENTRE LE VERNIS ET L’ÉPICERIE : Excédée par l’attitude peu révérencieuse
de Margaret Thatcher, la reine Elisabeth eut une cynique réplique à
l’égard de son Premier ministre: ‘grattez le vernis d’Oxford, vous
trouverez l’épicerie’, faisant allusion à l’échoppe où vécut, dans son
enfance, la ‘Dame de fer’. Maintenant que, chez nous, les lampions du
changement constitutionnel se sont bien éteints, pour certains dans
l’euphorie d’avoir contribué à rebâtir le Maroc sur un socle d’or, et
pour d’autres dans l’amertume de se retrouver, pour la sixième fois,
devant une boîte de Pandore, si les Marocains, eux aussi, grattaient
la nouvelle Constitution que trouveraient-ils ? On relève, certes, un
bon nombre de dispositions censées être ‘ des avancées’, qui doivent,
encore, être définies par des lois organiques qui ont toutes les
chances de s’étaler, nécessité de procédure oblige, sur une ou deux
législatures à venir, voire plus. Néanmoins, se situant,
manifestement, à la périphérie du Pouvoir, il n’est pas sûr qu’elles
auront un impact probant sur le fonctionnement des institutions dont
les mécanismes restent biaisés. Car le fond, lui, reste pratiquement
inchangé par rapport à la Constitution précédente. La décision ou
l’appréciation finale, maîtresse, et souveraine revient toujours au
seul pouvoir régalien. L’ombre de la Monarchie exécutive plane,
toujours, sur la prétendue nouvelle répartition des pouvoirs dont
certains ont claironné les mérites et qui n’est en fait qu’une
redistribution des privilèges, ne modifiant en rien la donne immuable
qui fait que si la notion de parti unique a toujours été écartée
depuis le premier texte de 1962, il lui a toujours été substituée
celle du ‘sentier unique’. Cette redistribution grossièrement fagotée
a été bizarrement baptisée ‘ Ce qui revient à Benkirane, et ce qui
revient au Roi’, comme s’il s’agissait du partage d’un legs dont le
Chef du gouvernement emporterait avec lui sa part, dans sa gibecière,
à la fin de son mandat. Volontairement négociée de manière à préserver
au monarque la part léonine, elle peut trouver son explication dans la
réticence, voire la crainte, du Chef du gouvernement d’endosser la
responsabilité dans les grands dossiers qui risqueraient d’impacter
fort négativement le capital électoral de son parti, ou dans un
fair-play de sa part à l’égard du Roi, dans le dessein inavoué
d’entrer un peu plus dans ses grâces. Ses partisans ne semblent,
évidemment, pas l’entendre de la même oreille, arguant qu’il détient,
plutôt, dans sa manche 1.181 prérogatives de nominations, alors que le
Roi n’en a plus que 37 ; comme si 1.181 cannes valaient plus que 37
épées, surtout si ces dernières sont en or, puisque leurs
récipiendaires sont ceux-là qui détiennent les bourses de l’Etat dont
on sait, parfaitement, comment elles sont gérées et que Mr Benkirane a
bien voulu, récemment, gratifier d’un ‘ Aâfa Allah Aâmma Salafe’- voir
sur le Net l’article consacré à ce sujet- Le véritable partage des
compétences en la matière est plutôt tranché indiscutablement par la
Constitution. Si le Chef de Gouvernement y détient 10 pouvoirs
explicites et 13 implicites, le pouvoir régalien, lui, apparaît à 27
reprises dans des fonctions explicites, et implicitement 15 fois. Il
s’est accru de 4 prérogatives par rapport à l’ancien texte. Au plan
législatif, si la Constitution n’apporte, par rapport à l’ancienne,
pratiquement aucun renforcement notable des prérogatives de la 1ère
Chambre, celle-ci est par contre plus concurrencée que par le passé
par la 2ème, promue à une sorte de Chambre de souveraineté que seul le
Roi peut dissoudre. Le fait est que le Chef de gouvernement n’a aucun
pouvoir sur cette Chambre qui, elle, a, par contre, sur lui un pouvoir
d’interpellation. Au plan judiciaire, la Constitution donne l’illusion
d’avoir hissé la Justice au rang de pouvoir autonome. Mais à l’égard
de qui ? En réalité, cette institution est passée d’une tutelle
gouvernementale relative, à travers le ministre de la Justice, chef du
Parquet général à une tutelle absolue en devenant une composante
directe du pouvoir régalien que la révision constitutionnelle était
censée, plutôt, réduire. L’indépendance de la Justice a de tout temps
constitué l’une des pierres d’achoppement entre le Pouvoir et les
forces vives de la Nation. Sa revendication a toujours été présentée
par celles-ci comme un des principaux tests d’une réelle volonté de
démocratisation du système. La logique veut que, normalement, le
pouvoir judiciaire soit être soumis à contrôle et interpellation du
Législatif. Ce principe paraît peu probable dans le contexte actuel.
Et, par conséquence, bon nombre de magistrats véreux peuvent se sentir
plus protégés qu’auparavant, du fait de leur appartenance, désormais,
à une institution qui échappe à la souveraineté populaire. Par
ailleurs, la raison essentielle qui a présidé à la révision
constitutionnelle avait, en principe, pour objet de ‘reprofiler’ la
Monarchie constitutionnelle, démocratique et sociale telle qu’elle
était définie dans l’ancien texte en régime parlementaire. L’honnêteté
et l’objectivité obligent à reconnaître que cette Constitution a été
savamment alambiquée, à l’exemple d’une mariée que l’on pare de
dorures et que l’on saupoudre à l’excès pour focaliser l’attention des
convives sur ces accessoires et masquer une imperfection faciale.
L’aspect parlementaire qui y a été ajouté se réduit, en fait, à un
adjectif. Parole, d’ailleurs, d’une voix des plus autorisées en la
matière, celle d’un juriste constitutionnaliste et de surcroît membre
de la CCRC, le professeur Najib Ba Mohamed, pour ne pas le nommer.
L’intéressé passait en direct sur le plateau de 2M, le 24 juin 2011,
soit une semaine avant le référendum. Désarçonné par la question de
Omar Balafrej : < la monarchie marocaine est-elle parlementaire ? >,
il n’a pu, l’espace d’un instant, réprimer une expression de surprise
; il a eu le courage de ne pas biaiser : < Non, avoua-t-il, la
monarchie marocaine n’est pas parlementaire parce que le Roi y existe
en tant que Pouvoir >. Il ajouta que les avancées contenues dans la
Constitution étaient une sorte de Charte enchâssée dans la
Constitution. Manifestement, sa consoeur Mme Nadia Bernoussi,
étincelante de toilette et brillante d’intelligence, ainsi que Mr
Driss Yazami, président du Conseil national des droits de l’Homme,
présents, tous les deux, sur le plateau, ont en eu pour leur grade.
Tout juste s’ils ont pu ravaler leur salive. Sans parler de Mr
Abdelmouneim Dilami, de l’hebdomadaire ‘ L’Economiste’, qui,
visiblement gêné par la proximité de Omar Balafrej durant toute
l’émission, avait navigué entre les récifs, et voyait, subitement, son
laïus flanqué par terre.
Force est de constater qu’un an après
l’adoption de la nouvelle Constitution, et sept mois après
l’investiture du gouvernement actuel aucun changement, ni prémisses de
changement n’est intervenu dans les faits. Les mêmes hommes, les mêmes
mécanismes institutionnels, les mêmes mentalités et les mêmes méthodes
commandent à l’État. Le pays continue de végéter dans les mêmes
inepties et de souffrir des mêmes maux. Rien ne distingue le Maroc
d’aujourd’hui de celui d’avant Référendum. Seule retouche est que
cette fois-ci le ‘ cirque’ dont Hassan II avait affublé l’ancien
parlement s’est étendu au gouvernement. Un seul moyen de s’en sortir :
la Refondation de l’Etat que je préconise dans mon Manifeste politique
et que j’ai exposée dans mon Mémorandum remis le 2 mai 2011 à la CCRC
, et à cet effet une première étape : une nouvelle Révision
constitutionnelle. Sinon, une fois de plus, les Marocains auront raté
le rendez-vous avec l’Histoire.
de Margaret Thatcher, la reine Elisabeth eut une cynique réplique à
l’égard de son Premier ministre: ‘grattez le vernis d’Oxford, vous
trouverez l’épicerie’, faisant allusion à l’échoppe où vécut, dans son
enfance, la ‘Dame de fer’. Maintenant que, chez nous, les lampions du
changement constitutionnel se sont bien éteints, pour certains dans
l’euphorie d’avoir contribué à rebâtir le Maroc sur un socle d’or, et
pour d’autres dans l’amertume de se retrouver, pour la sixième fois,
devant une boîte de Pandore, si les Marocains, eux aussi, grattaient
la nouvelle Constitution que trouveraient-ils ? On relève, certes, un
bon nombre de dispositions censées être ‘ des avancées’, qui doivent,
encore, être définies par des lois organiques qui ont toutes les
chances de s’étaler, nécessité de procédure oblige, sur une ou deux
législatures à venir, voire plus. Néanmoins, se situant,
manifestement, à la périphérie du Pouvoir, il n’est pas sûr qu’elles
auront un impact probant sur le fonctionnement des institutions dont
les mécanismes restent biaisés. Car le fond, lui, reste pratiquement
inchangé par rapport à la Constitution précédente. La décision ou
l’appréciation finale, maîtresse, et souveraine revient toujours au
seul pouvoir régalien. L’ombre de la Monarchie exécutive plane,
toujours, sur la prétendue nouvelle répartition des pouvoirs dont
certains ont claironné les mérites et qui n’est en fait qu’une
redistribution des privilèges, ne modifiant en rien la donne immuable
qui fait que si la notion de parti unique a toujours été écartée
depuis le premier texte de 1962, il lui a toujours été substituée
celle du ‘sentier unique’. Cette redistribution grossièrement fagotée
a été bizarrement baptisée ‘ Ce qui revient à Benkirane, et ce qui
revient au Roi’, comme s’il s’agissait du partage d’un legs dont le
Chef du gouvernement emporterait avec lui sa part, dans sa gibecière,
à la fin de son mandat. Volontairement négociée de manière à préserver
au monarque la part léonine, elle peut trouver son explication dans la
réticence, voire la crainte, du Chef du gouvernement d’endosser la
responsabilité dans les grands dossiers qui risqueraient d’impacter
fort négativement le capital électoral de son parti, ou dans un
fair-play de sa part à l’égard du Roi, dans le dessein inavoué
d’entrer un peu plus dans ses grâces. Ses partisans ne semblent,
évidemment, pas l’entendre de la même oreille, arguant qu’il détient,
plutôt, dans sa manche 1.181 prérogatives de nominations, alors que le
Roi n’en a plus que 37 ; comme si 1.181 cannes valaient plus que 37
épées, surtout si ces dernières sont en or, puisque leurs
récipiendaires sont ceux-là qui détiennent les bourses de l’Etat dont
on sait, parfaitement, comment elles sont gérées et que Mr Benkirane a
bien voulu, récemment, gratifier d’un ‘ Aâfa Allah Aâmma Salafe’- voir
sur le Net l’article consacré à ce sujet- Le véritable partage des
compétences en la matière est plutôt tranché indiscutablement par la
Constitution. Si le Chef de Gouvernement y détient 10 pouvoirs
explicites et 13 implicites, le pouvoir régalien, lui, apparaît à 27
reprises dans des fonctions explicites, et implicitement 15 fois. Il
s’est accru de 4 prérogatives par rapport à l’ancien texte. Au plan
législatif, si la Constitution n’apporte, par rapport à l’ancienne,
pratiquement aucun renforcement notable des prérogatives de la 1ère
Chambre, celle-ci est par contre plus concurrencée que par le passé
par la 2ème, promue à une sorte de Chambre de souveraineté que seul le
Roi peut dissoudre. Le fait est que le Chef de gouvernement n’a aucun
pouvoir sur cette Chambre qui, elle, a, par contre, sur lui un pouvoir
d’interpellation. Au plan judiciaire, la Constitution donne l’illusion
d’avoir hissé la Justice au rang de pouvoir autonome. Mais à l’égard
de qui ? En réalité, cette institution est passée d’une tutelle
gouvernementale relative, à travers le ministre de la Justice, chef du
Parquet général à une tutelle absolue en devenant une composante
directe du pouvoir régalien que la révision constitutionnelle était
censée, plutôt, réduire. L’indépendance de la Justice a de tout temps
constitué l’une des pierres d’achoppement entre le Pouvoir et les
forces vives de la Nation. Sa revendication a toujours été présentée
par celles-ci comme un des principaux tests d’une réelle volonté de
démocratisation du système. La logique veut que, normalement, le
pouvoir judiciaire soit être soumis à contrôle et interpellation du
Législatif. Ce principe paraît peu probable dans le contexte actuel.
Et, par conséquence, bon nombre de magistrats véreux peuvent se sentir
plus protégés qu’auparavant, du fait de leur appartenance, désormais,
à une institution qui échappe à la souveraineté populaire. Par
ailleurs, la raison essentielle qui a présidé à la révision
constitutionnelle avait, en principe, pour objet de ‘reprofiler’ la
Monarchie constitutionnelle, démocratique et sociale telle qu’elle
était définie dans l’ancien texte en régime parlementaire. L’honnêteté
et l’objectivité obligent à reconnaître que cette Constitution a été
savamment alambiquée, à l’exemple d’une mariée que l’on pare de
dorures et que l’on saupoudre à l’excès pour focaliser l’attention des
convives sur ces accessoires et masquer une imperfection faciale.
L’aspect parlementaire qui y a été ajouté se réduit, en fait, à un
adjectif. Parole, d’ailleurs, d’une voix des plus autorisées en la
matière, celle d’un juriste constitutionnaliste et de surcroît membre
de la CCRC, le professeur Najib Ba Mohamed, pour ne pas le nommer.
L’intéressé passait en direct sur le plateau de 2M, le 24 juin 2011,
soit une semaine avant le référendum. Désarçonné par la question de
Omar Balafrej : < la monarchie marocaine est-elle parlementaire ? >,
il n’a pu, l’espace d’un instant, réprimer une expression de surprise
; il a eu le courage de ne pas biaiser : < Non, avoua-t-il, la
monarchie marocaine n’est pas parlementaire parce que le Roi y existe
en tant que Pouvoir >. Il ajouta que les avancées contenues dans la
Constitution étaient une sorte de Charte enchâssée dans la
Constitution. Manifestement, sa consoeur Mme Nadia Bernoussi,
étincelante de toilette et brillante d’intelligence, ainsi que Mr
Driss Yazami, président du Conseil national des droits de l’Homme,
présents, tous les deux, sur le plateau, ont en eu pour leur grade.
Tout juste s’ils ont pu ravaler leur salive. Sans parler de Mr
Abdelmouneim Dilami, de l’hebdomadaire ‘ L’Economiste’, qui,
visiblement gêné par la proximité de Omar Balafrej durant toute
l’émission, avait navigué entre les récifs, et voyait, subitement, son
laïus flanqué par terre.
Force est de constater qu’un an après
l’adoption de la nouvelle Constitution, et sept mois après
l’investiture du gouvernement actuel aucun changement, ni prémisses de
changement n’est intervenu dans les faits. Les mêmes hommes, les mêmes
mécanismes institutionnels, les mêmes mentalités et les mêmes méthodes
commandent à l’État. Le pays continue de végéter dans les mêmes
inepties et de souffrir des mêmes maux. Rien ne distingue le Maroc
d’aujourd’hui de celui d’avant Référendum. Seule retouche est que
cette fois-ci le ‘ cirque’ dont Hassan II avait affublé l’ancien
parlement s’est étendu au gouvernement. Un seul moyen de s’en sortir :
la Refondation de l’Etat que je préconise dans mon Manifeste politique
et que j’ai exposée dans mon Mémorandum remis le 2 mai 2011 à la CCRC
, et à cet effet une première étape : une nouvelle Révision
constitutionnelle. Sinon, une fois de plus, les Marocains auront raté
le rendez-vous avec l’Histoire.
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Un seul moyen de s’en sortir : la Refondation de l’état
Un seul moyen de s’en sortir : supporter l’effort réformiste du gouvernement Benkirane