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Le Mali entre ceux qui sèment la démocratie et ceux qui sèment la terreur

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Le Mali entre ceux qui sèment la démocratie
et ceux qui  sèment la terreur

Le Maroc est à l’honneur des festivités de l’investiture du nouveau président malien élu Ibrahim Boubakar Keïta (IBK), après un long processus militaire et politique déclenché il y a moins d’une année. Le 19 septembre restera une date mémorable de cette investiture où SM Mohammed VI a été l’Invité d’honneur et derrière lui tout le Maroc, comme pays maitre d’œuvre en matière de démocratie, de  libertés d’expression, de pluralité politique et de diversité culturelle. C’est un geste de reconnaissance envers notre pays pour tout ce qu’il a fait en faveur du peuple malien pour le faire sortir du marasme vécu, et un témoignage éloquent pour sa position franche contre le terrorisme qui a secoué ce pays et a mis en danger tout son tissu territorial, économique et social.
Pour nous, le Mali doit représenter aussi quelque chose pour notre mémoire collective nationale dont les faits reviennent à l’année 1963. C’était tout simplement une année de guerre, appelée guerre des sables, qui opposait notre pays à notre voisin algérien qui venait juste d’acquérir son indépendance. A un moment donné, on a révélé que la guerre des sables entre deux pays frères allait prendre fin, et qu’une médiation allait prendre son cours. Le lieu de rencontre entre Le Feu Hassan II et le président algérien de l’époque A. Benbellah comme premier président d’après l’indépendance, était Bamako comme capitale du Mali, et le responsable chargé de cette médiation fut le président Modibo Keita, aussi comme premier président malien d’après l’indépendance.
Le Malin est un pays de crises politiques successives et aigues, qu’on peut vite comprendre à travers son histoire contemporaine, sa composition ethnique, sa géographie et son économie. De là, nous pouvons facilement  souligner pourquoi un tel pays est proie à une toute une  série d’instabilités depuis son indépendance, avec des conflits qui l’ont incessamment déchiré.
Le conflit avec le mouvement des Touaregs est entré dans sa phase décisive en 2007, qui a été marquée par l’enlèvement de quinze soldats dans le nord-est du pays, près de la frontière algérienne. En 2008, c’est le nom du chef militaire Ibrahim Ag Bahanga (IAB) qui a fait tête d’affiche, comme commandant du Mouvement Touareg du Nord-Mali (MTNM), rendu responsable de l’enlèvement de 33 militaires maliens dans le nord du pays. Mais cette tension va vite se calmer par la signature à Tripoli, d’un protocole d’entente qui met fin aux hostilités entre le gouvernement et les rebelles sous commandement d’IAB avec  le démantèlement total de leurs bases. La mort accidentelle d’IAB en 2011, a eu comme effet pervers la création du Mouvement National pour la libération de l’Azawad (MNLA), qui revendique l’autodétermination de la région de l’Azawad, au nord du pays
L’année 2012 a commencé par un début chaud causé par une montée à la vitesse supérieure de la lutte armée entre le MNLA et le gouvernement malien, par la prise d’Aguelhok dans le nord du pays. Par la suite, il y a eu dans un ordre chronologique :
– La rupture entre le MNLA et Ansar Eddine, mouvement salafiste, conduit par Iyad Ag Ghali (IAG), qui a souhaité l’instauration de la Charia.
– Le coup d’Etat du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDRE), présidé par le colonel A. H. Sanogo qui a fait adopter une nouvelle constitution sous le nom « Acte Fondamental »
– Ansar Eddine s’empare de Kidal, le MNLA prend Gao et Tambouctou en coïncidence avec l’exclusion suivie de sanctions et d’embargo total de la CEDEAO contre le CNRDRE. Le MNLA est chassée de Tambouctou par Ansar Eddine, mais proclame tout de même et de façon unilatérale l’indépendance de l’Azawad.
– Signature d’un accord d’un accord entre le CNRDRE et CEDEAO, prévoyant le transfert du pouvoir aux civils et l’organisation d’élections sous 40 jours, avec la levée des sanctions et de l’embargo total de la CEDEAO.
– Création du Front de libération national de l’Azawad dans le nord-est du pays, dans le même jour de la démission de A. T. Touré avec l’investiture de Dionocounda Traouré (DT) comme président de transition.
– Arrivée au pays des combattants de l’AQMI, qui ont commencé à la manière des Talibans, par la profanation et la destruction du mausolée revenant à l’Imam Sidi Mahmoud Ben Amar de Tambouctou. Au même temps un accord est signé entre la CEDEAO, le gouvernement de transition et les putschistes, qui prolonge le mandat du président par intérim.
La suite de l’histoire est bien connue, un petit mariage surréaliste et de courte durée entre le MNLA et Ansar Eddine au sein d’un conseil transitoire de l’Etat Islamique de l’Azawad, au terme duquel les deux alliés signent un protocole instaurant le dit Etat « qui doit appliquer la législation islamique dans tous les domaines de la vie, basée sur Le Coran et La Sounna ». C’est tout à fait naturel qu’un tel projet de fusion soit rejeté par le MNLA, connu par ses aspirations nationales et ses revendications plus identitaires et territoriales que d’autres. L’apparition d’un nouveau venu dans le conflit le MUJAO, qui a commencé par chasser le MNLA de Gao. Tous les mausolées soufis de Tambouctou sont détruits pat le groupe d’Ansar Eddine, en réponse à son inscription sur la liste du patrimoine mondial en péril. Les deux groupes salafistes ne donnent aucune chance au MNLA d’exister, et le chassent définitivement de son dernier bastion d’ANSOGO. Les grandes quantités d’armes récupérées de Lybie ont permis à ces deux groupes d’être les maitres du jeu dans toute la zone sahélo-saharienne. La folie de devenir les chefs de guerre du désert, contrôlant toute sorte de trafic, drogue, immigration clandestine dont souffre notre pays, vente d’armes et prises d’otages, leur a donnée de l’appétit pour plus d’expansion vers le sud mettant par là en danger le gouvernement de Bamako.
L’année 2013 est l’année du jeu à la roulotte russe, et les événements qui se sont succédés, sont bien connus de tous, un champ de bataille où l’aviation française a fait le bon ménage en chassant  les rebelles jes grandes villes vers les reliefs à proximité de la frontière algérienne.
Le Maroc de son côté, n’a jamais été loin du conflit malien en ouvrant son espace aérien à l’intervention française, qui a dispersé et chassé les groupes armés rebelles de toutes les grandes villes du nord malien, qui étaient des villes martyrisées et transformées en Cartel de rassemblement de butins et de rentes de tout espèce : trafics d’armes et de drogues, de l’immigration clandestine et surtout des aides fournies par les organisations humanitaires aux populations de la région. Certes, le Maroc a joué le plus important des rôles auprès de l’ONU pour qu’une intervention militaire soit adoptée comme résolution, privilégiant par là l’unité territoriale de ce pays, comme pour tant d’autres pays. La Maroc a aussi été très actif auprès des pays occidentaux, demandant leur soutien sur le terrain une fois la bataille commencée contre ces groupes armés, en vue de la gagner sans ambages ni bavures. En agissant de la sorte, le Maroc veut faire sa place politique sur la scène africaine, et donc souhaiter voir se dessiner une nouvelle carte géopolitique avec moins d’influence des services de renseignements et sécuritaires algériens qui ont tout fait pour isoler notre Royaume. Ces services ont toujours eu la mainmise sur le problème des Touaregs, qui leur permet de contrôler le fin fond de ses voisins, et faire pression sur les pouvoirs en place pour pérenniser leur reconnaissance du front de la honte, le Polisario. Les groupes rebelles ont anticipé cette confrontation, pour gagner du temps et mettre la communauté internationale devant un fait accompli sachant les forces africaines allaient prendre plus de temps à se mettre en place.
Cette intervention a eu lieu et depuis, la vigilance est encore maître du jeu au Maroc dont tous les services sécuritaires suivent avec une attention extrême, afin d’éviter de faire les frais de cette intervention. L’Algérie a joué un rôle de premier plan dans la création du CEMOC (Comité des Etat-major Opérationnels Conjoints) comme mécanisme conçu pour faire face au péril de l’AQMI, et qui regroupe plusieurs pays sahélo-sahariens sans oublier que l’Algérie a utilisé tous les moyens  de garder le Maroc hors de ce comité. Une question que tous les observateurs se sont posés est la suivante ; pourquoi ce comité inter-Etat était étrangement paralysé, comme en état d’hibernation, depuis la crise malienne ? C’est une attitude qui a suscité l’incompréhension de tous ses partenaires tant africains que d’autres. Alors que le Maroc a su renforcer (et doit continuer à le faire) efficacement ses mesures de sécurité.
Sur le plan diplomatique, C’est encore l’Algérie qui a parrainé les discussions entre le MNLA (Mouvement de Libération de l’Azawad) et le groupe jihadiste Ansar Eddine, et qui ont touché à leur fin en décembre 2012 sans aboutir à aucun résultat tangible. A ce sujet précis, la France a usé de son influence auprès de ses partenaires africains (Burkina Faso, Mauritanie), pour prêter main forte à ces discussions et œuvrer à leur réussite. La France aurait même pesé sur la désignation de Romano Prodi comme émissaire de l’ONU pour le Sahel qui, malheureusement ne s’est jamais rendu sur les lieux, mais il a évoqué la possibilité d’une intervention militaire de la FISMA vers le mois de septembre 2013. Les événements vécus ont montré qu’un tel agenda a tout été simplement raté.
Maintenant qu’une nouvelle réalité s’installe avec l’investiture du nouveau président IBK,  selon un processus électoral au sujet duquel les observateurs se déclarent satisfaits, car c’était un scrutin homogène malgré quelques imperfections, qui n’ont pas entaché pas sa bonne tenue. Des résultats officiels du second tour proclamés le 15 août 2013, IBK sort vainqueur avec un score historique de 77,60%. Quant à l’avenir de ce pays, S. M. a prononcé un discours où il a réitéré la position ferme du Maroc contre toute sorte d’obscurantisme et d’extrémisme qui ont ravagé ce pays, en soulignant entre autres l’apport du Maroc pour sa reconstruction et à sa réconciliation nationale. La France s’est aussi montrée prête à contribuer à cette reconstruction selon les moyens dont elle dispose, aussi bien de la part des pouvoirs publics, des collectivités territoriales que des ONGs.
Les événements politiques et de guerre qu’a vécus le Mali ont montré à l’évidence le rôle majeur et pertinent des renseignements algériens dans la crise malienne, qui veut pérenniser sa maitrise de toutes les ficelles du jeu politique de l’Afrique subsaharienne. Hors, ce qui vient de se passer est, selon certains observateurs s’intéressant aux affaires du Maghreb, un échec cuisant de ce rôle, car nous allons assister à la naissance d’une nouvelle carte géopolitique de la région. Dans cette carte il va certainement y avoir une place pour le Maroc, car plus de dix pays africains ont constitué la MISMA (Mission Internationale de soutien au Mali), qui est une force créée à la demande et sous influence du Maroc à l’ONU. Ces forces ont beaucoup œuvré à côté des troupes françaises et maliennes pour que le processus électoral soit déclenché, et un pouvoir démocratiquement élu, soit mis en place. Selon ces mêmes observateurs, les luttes dans les territoires sahélo-sahariens revêtent une forme de guerre froide entre le Maroc et l’Algérie. La présence de SM au Mali en tant qu’invité d’honneur aux cérémonies d’investiture,  a un seul message à dresser aux opinions publiques africaines; le Maroc est pays qui sème la démocratie et la stabilité. Avec une telle posture, le geste du Maroc aura pour effet à long terme de couper l’herbe sous les pieds de tous les projets du régime algérien tendant à isoler le Maroc sur la scène africaine. Si notre pays  réussit à imposer ses règles du jeu, il pourra alors consolider davantage sa percée dans la région sur plus d’un plan. Ce sera un début de bouleversement des options politiques en place, et leur remplacement par des politiques plus lucides rejetant toute reconnaissance envers le front de la honte, le Polisario. C’est un chemin qui va reconduire notre pays à récupérer sa place  au sein de l’OUA, dont il a été parmi les fondateurs.

        D’ici quelques temps le monde va découvrir les liens intimes entre ces groupes jihadistes et le Polisarion, ils vont certainement changer d’attitude vis-à-vis du Sahara marocain. Maintenant, le voile est levé sur les relations organiquement profondes, entre le Polisario et les groupes terroristes sillonnant le large du Sahara et qui se mettent à la disposition pour toute exécution de projets d’Al Qaida dans la région. La révélation faite par l’Institut des Etudes Stratégiques de Washington la fin du mois de janvier passé, a été frappante et sans ambages : il cite que ces groupes ont beaucoup intensifié de leur coopération avec le Polisario qui est leur principal pourvoyeur en hommes, issus surtout des camps de Tindouf. C’est une coopération qui porte sur l’aide logistique, pour se munir d’armes fournis ou vendus par des mafias locales, spécialisées dans la vente d’armes récupérées pendant la révolution libyenne.
La France est un pays qui connait une crise grave, qui ne lui permet pas de reconstruire le Mali, mai qui a réussi à faire face à son ennemi invisible en le combattant jusqu’à presque l’éradiquer.  Au début, c’était une série de questions qui furent posées sur les capacités de la France à faire face aux groupes armés rebelles. Heureusement que cette France est déjà perçue par les africains comme une puissance moyenne et régionale, n’ayant pas les moyens de sa politique. A ce sujet, les observateurs n’ont pas cessé de se poser les questions du genre : La France a-t-elle les capacités de garantir la paix au Mali, contenir les extrêmes, éradiquer le terrorisme, subvenir aux besoins des réfugiés, effacer la dette malienne, rassurer les français du Mali, poursuivre les auteurs d’exactions au sein des militaires. Au point où l’on, une partie du pari français semble sur la piste de la réussite.
En relation avec le sujet malien, le sommet de l’OCI (Organisation de la Conférence Islamique) a eu lieu au Caire les 6 et 7 février 2013, après quelques semaines de l’intervention française. A cette issue,  la conférence de presse finale du président sortant M. Oglo, a fait état de positions franches vis à vis des groupes terroristes se disant de l’Islam, et il demandé pour qu’ils soient combattus par tous les moyens et que ces groupes ne représentent en rien cette religion si tolérante et reconnaissante de l’autre. Comme il a ajouté qu’il est du devoir de tout musulman de les dénoncer, de les chasser car le danger qu’il représente sur l’Islam est plus grave que celui de ses adversaires. En écoutant de telles déclarations, on peut vite s’apercevoir du grand décalage entre ces déclarations et celles faites sur quelques chaines de télévisions du moyen orient, y compris Al Jazeera qui ont nagé à contre courant en allant droit à traiter l’intervention française comme une attaque contre l’Islam ou encore comme une guerre des croisés. Entrainés par l’euphorie de tels discours, « ces présumés prédicateurs » n’ont pas eu de temps à accorder à l’Imam de La Grande Mosquée de Bamako, (car il ne fait pas partie de l’Empire des Frères Musulmans), qui dans la prière du vendredi d’après l’intervention française, il a remercié Allah d’Avoir Envoyé un ami au Mali qui l’a protégé de ces criminels semant la terreur dans les villes occupées. Une autre intervention qui ne semble pas avoir eu d’écho non plus chez ces prédicateurs, c’est la déclaration du Président du Conseil Islamique Suprême du mali qui a remercié la France pour son intervention, qui a déclaré que «  Nous avions frappé  sur toutes les portes, celles des Oulémas, des Prédicateurs, des Grands Fquihs, les chefs d’Etats arabes et musulmans, leur demandant d’intervenir pour que cessent les exactions que commettent ces groupes terroristes à l’encontre des populations innocentes au nom de la Charia : lapidation, amputations des membres, viols et exécutions. Mais, ces frères ont fait les sourdes oreilles comme si ces demandes étaient plus que rien ! Maintenant qu’un pays ami intervient à la demande des peuple et gouvernement maliens, ces sourdes oreilles sont parties dans leurs interprétations archaïques habituelles des événements, qu’ils ont mis encore une fois et comme ils ont l’habitude de faire, sur le compte de conflits de civilisations et des croisades. Il se s’agit ni de croisades ni de conflits de civilisations, mais d’un peuple auquel on veut imposer un mode de vie, qui n’est pas le sien ». Cette déclaration faite a visé essentiellement le président égyptien déchu M. Morsi encore en exercice, qui a critiqué l’intervention française au Mali, ainsi que son maître à penser, le chef de l’Empire International des Frères Musulmans’, empereur de la fatwa Y. Al Karadhaoui. Le premier est déchu par le mouvement populaire de 30 juin, sans égal dans l’histoire avec plus de 35 millions de manifestants dans les rues. Pour le second, on continue à se poser la question s’il a reçu e message de la démocratie en place?  Mesure-t-il le décalage entre sa première déclaration et la réalité actuelle ? Il nous semble que non, car quand on est issu d’une formation politique où les idées sont à sens unique, il est impossible de percevoir les idées allant ou venant dans d’autres sens.
Par Abdelkarim NOUGAOUI
Professeur de Physique à l’Université Mohammed Premier Oujda

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