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Al Qaida et le Printemps Arabe (2/2)

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                         Al Qaida et le Printemps Arabe   (2/2)

          La révolution libyenne n’a pas été affaire juteuse seulement pour le peuple libyen, qui s’est débarrassé d’un Tyran de plus de quarante ans de pouvoir sans partage. Et que la folie des grandeurs, le non savoir quoi faire de ce pouvoir, de   l’insouciance sans limite ont eu comme résultat l’effet pervers de s’autoproclamer Roi des rois  de l’Afrique. Sans oublier tout de même le très  mauvais impact qu’il avait eu sur la question de notre intégrité territorial, en armant et en finançant le Polisario. Le second bénéficiaire de cette affaire juteuse est bien entendu Al Qaida, au sujet duquel tout le  monde est maintenant unanime qu’elle a gagné le gros lot au courant de la révolution libyenne. En effet, pendant que les affrontements entre les forces révolutionnaires et le système phalangiste de Kaddafi furent à leur paroxysme, dans le calme et l’insu de tous, elle est arrivée à mettre la main sur  d’importantes quantités d’armes de toute catégorie et des munitions. Il faut reconnaître tout de même que des services de renseignements de certains pays comme l’Algérie ont  évoqué ce problème, mais sans être pris au sérieux à cause de leur complicité avec le régime libyen. Ces armes une fois acheminés vers le sud du pays, ensuite vers le nord malien, ils sont devenus l’instrument qui a bouleversé l’équilibre des forces dans ce pays. 

    Profitant du désordre qui y a régné, et ce suite au putsh organisé par une junte militaire, qui n’ pas su quoi d’un pouvoir qu’elle avait eu entre les mains, car elle avait en face d’elle toute la communauté internationale qui n’a nullement accepté ce genre de fait accompli, les islamistes d’AQMI et du MUJUJAO avec le mouvement  des Touareg autochtones , ont eu chemin facile à proclamer un Etat Islamique sur un terrain regroupant les deux tiers du pays qui s’appelait jadis le Mali. Que faire devant une telle situation ? La communauté internationale reste indécise. Le Comité d’Etat-Major Opérationnel Conjoint (CEMOC)regroupant l’Algérie avec des pays sahariens, en tant que mécanisme conçu par Alger (qui s’efforce avec tous les moyens de garder le Maroc hors à ce comité) face seulement au péril d’AQMI reste paralysé, et refusant toute intervention en dehors de ces pays.

      Les occidentaux sont suffisamment expérimentés en matières de ce genre de conflits vécus en Iraq, et qui continue à l’être en  Afghanistan tout en étant mis  sur le compte du «  choc des civilisations », comme thèse développée dans les années 1990 par l’américain Samuel Huntington. Ce dernier prédisait que les conflits à venir ne se noueraient plus autour de la quête de territoires ou d’affrontements idéologiques, comme ce fut le cas de la guerre froide, mais de confrontations culturelles et confessionnelles. Ces occidentaux  n’ont plus l’intention de renouer avec des interventions militaires dont les résultats sont connus è l’avance. Une guerre n’est jamais propre, et dès les premiers civils touchés, les retentissements commencent à s’exprimer et les forces d’intervention deviennent forces d’occupation.                                                                                                                                 

    Le mouvement des Touaregs autochtones a des revendications identitaires avec aspirations démocratiques et modernes, qui n’ont rien à voir ceux des deux branches d’Al Qaida. C’est un mouvement de libération  qui revendique du terrain partagé entre plusieurs pays sahélo- Sahariens. Son alliance avec Al Qaida reste tout de même étrange et ne peut s’expliquer que par le pouvoir de la force dicté sur le terrain par les islamistes grâce aux armes récupérés sur le sol libyen. Ce mini-Etat et toutes ses orbites savent maintenant ce qui les attend, une force d’intervention africaine certes, mais la question posée c’est quand et comment ? La demande d’une force internationale a déjà été officiellement lancée par le gouvernement loyal lors de la dernière session de l’AG onusienne. La réponse viendra certainement quand le problème somalien sera décanté, car personne n’a envie d’ouvrir deux fronts avec un même ennemi. L’épuiser d’abord en Somalie, et continuer à le faire encore plus au Mali.

      Les renseignements des tous les pays limitrophes, ainsi que ceux des pays occidentaux y compris les USA, ne sont plus en hibernation. Ils guettent tout mouvement et toute action des groupes armés en place, et les téléobjectifs à bord des satellites américains dont la résolution est connue, devraient être en fonction à temps plein. C’est malheureusement un pays souverain qui s’est vu du jour au lendemain, occupé par les deux branches locales d’Al Qaida qui ont recruté et continuent à recruter impunément un peu partout et selon le même schéma. Repérer les personnes en situation de précarité et au ban de la société, les endoctriner avec un lavage de cerveau adéquat, et les mettre à disposition comme chaire humaine à tout faire.

     Les opérations de nuisance de ces mouvements rassemblés au sein de ce mini-Etat à la communauté internationale commencent à se faire sentir par tous. Ce n’est pas le même style qu’au large de la Somalie qui a connu des années de piratage de bateaux sans précédent. Ce sont cette fois, des opérations de Kidnapping et d’assassinats perpétrés respectivement sur les territoires algérien et libyen, qui sont sur la mise. Deux opérations spectaculaires ont marqué les faits : le kidnapping de six agents consulaires algériens, dont deux déjà exécutés et les quatre autres gardés comme otages. A Benghazi, c’est le tour de l’ambassadeur américain en Lybie de faire les frais de la présence massive d’Al Qaida en Lybie. Son assassinat a été précédé de l’attaque armée perpétrée contre le consulat américain à Benghazi au mois de juin 2012. Ces deux actes sur le sol libyen ont bel et bien été planifiés et le matériel mis en jeu ne peut être manipulé par quiconque.

    C’est un acte qui est commis à la veille du 11 septembre, comme réplique à l’assassinat d’un des Emirs de guerre d’Al Qaida dans la région frontalière pakistano-afghan, nommé Abou Yahya Allibi. Auparavant, un communiqué signé par le chef de l’organisation Ayman Adhawahri, a fait part de sa détermination à venger cette tuerie. Ceci démontre et à quel point l’organisation tient parole, et  parvient  à honorer ses engagements meurtriers comme c’est le cas au quotidien de l’Iraq, où l’intensification des opérations semble revenir avec plus de tonalité. En Libye toujours, la destruction des sanctuaires et tombeaux soufistes avec les mosquées les côtoyant, sont des actes portant la signature d’Al Qaida. Ses drapeaux noirs montrés un peu partout sur le territoire, et dans les plus grandes villes font la promesse d’un lendemain sanglant et incertain. En Syrie, l’organisation est en train de bâtir ses bases dans une course contre la montre, pour marquer sa présence et se faire un impact dont elle aura besoin au jour de la chute certaine du régime de Bachar El Assad. Le salafisme wahabite est l’idéologie qui endoctrine la nébuleuse dans ses actes comme dans ses discours.

    Mais en Egypte c’est tout un autre schéma qui se dessine, puisque les salafistes du Parti Ennour ont participé aux élections législatives comme Force Politique et ont fait un score de 20%, à côté des  Frères Musulmans qui en ont fait 40%. Cette participation est de nature à éliminer dans l’immédiat, la dangerosité d’Al Qaida surtout que le pouvoir est aux mains des Islamistes du PJL. Dès l’accès au pouvoir de Morsi, après avoir remporté les élections  présidentielles, ce dernier a montré une ferme détermination à combattre tous les aspects terroristes d’où qu’ils viennent. La démonstration de forces dans le nord-Est du Sinai contre des terroristes présumés a été une symbolique à retenir. 

   En Tunisie, le salafisme est bien présent, et deux faits spectaculaires ont marqué ce pays depuis la chute de Ben Ali : Ils sont l’affaire de la chaine de télévision privée Nassma après avoir diffusé le film de production franco-iranienne matérialisant  « l’Etre de Dieu », et celle de la faculté des lettres et des Sciences humaines de Manouba dont le doyen a interdit le port du nikab aux étudiantes. L’opération du déchirement du drapeau tunisien flottant sur le toit de cette même faculté, par un militant salafiste a été un sujet de débat quotidien dans tous les coins de Tunisie. L’accueil chaleureux réservé à la jeune étudiante (sans voile ni nikab) qui a tenté d’empêcher cette acte, par le président M. Marzouki qui lui a discerné une médaille de haute distinction, a aussi été un événement qui a marqué les esprits.

      Des démonstrations de forces au quotidien, portant parfois atteinte aux droits des femmes et des hommes ont partout été signalés mais, sans trouver écho chez le pouvoir en place. Ce qui ressemble à de l’intransigeance, voire même de la complaisance car le mouvement Annahdha les considère toujours comme une réserve électorale, et d’incessantes réunions et rencontres ont lieu entre les chefs du salafisme tunisien, en l’occurence Abou Iyyadh et Abou Ayyoub et le président de ce mouvement Rachid Ghannouchi. Personne n’est surpris par la nouvelle « choc », parlant d’une vidéo qui montre  R. Al Ghannouchi en rencontre avec ces chefs salafistes tunisiens, auxquels il a prodigué  dires et conseils à suivre qui n’ont rien avoir avec ce qu’il prononce en public. Il leur a surtout conseillé d’investir dans la culture et les médias pour barrer la route aux laïcs mécréants, selon cette même vidéo. Et que la présence de ces laïcs dans les divers organes et artères de l’Etat tunisien n’est qu’une question de temps, et ils finiront par être vidés de ces lieux. Ce qui résume en toute simplicité le double langage, comme pratique courante.

   En Algérie, la montée en puissance du FIS dans les élections législatives en 1990 et l’intervention de l’armée dans l’annulation des résultats de ces élections, a incité les gagnants à mettre en route l’action de la branche armée l’AIS. Après avoir déposé les armes après quelques années de confrontations meurtrières, c’est les GIA qui ont eu le devant de la scène des opérations. Rebaptisé les GSPC, et ensuite l’AQMI qui continue à ouvrer sur tout le territoire sahélo-saharien, en compagnie du MJUJAO. Des informations crédibles confirment l’occupation du nord du Mali par des groupes, pour la grande majorité issus des camps des séquestrés de Tindouf. Nul ne peut ignorer que les hordes de ces recrus circulent librement en territoire algérien et s’adonnent en toute impunité à des enlèvements, des demandes de rançons et des partages de revenus tirés des trafics de tout genre. Un constat qui nous amène à poser la question suivante : Pourquoi l’Algérie, qui ne peut ignorer ce qui se passe sur son territoire et dans les camps de Tindouf sous son contrôle refuse d’intervenir pour mettre fin à ces activités ?  Une attitude algérienne qui suscite l’incompréhension de tout le monde et le Maroc dans ce cas, n’a pas de choix que de renforcer efficacement le contrôle de ses frontières.  

   Au Maroc, c’est un autre type de mutation qui est en train de s’opérer. Les dates du 20 février, du 9 mars, du 1 juillet, du 25 et 29 novembre pour la seule année 2011 ; et le 3 janvier pour l’année 2012 sont des dates dont les événements ont fait entrer notre pays dans un élan démocratiques sans précédent. Le Premier Ministre devenu Chef de Gouvernement, est passé du statut de Serviteur du Trône au statut de Président du Gouvernement avec de larges prérogatives.

    Pour nos salafistes, il faut avouer qu’ils étaient pris à contre-pied par les attentas événements du 16 mai 2003, et les traitements purement sécuritaires qu’ils ont subi leur ont valus un emprisonnement pendant de longues années. Les odeurs de moisissures,                             l’air humide et sombre des cellules d’emprisonnement leur ont donné beaucoup à réfléchir. Après leur libération et ce  grâce au Printemps Arabe, ils se trouvent maintenant dans la croisée des chemins de Que Faire ? Une première tranche tente de retrouver une vie normale sans revenir à la politique, une seconde qui se cherche à travers une vie associative pour la prédication (la Dâawa) et une troisième cherche à créer un parti en vue de participer à la vie politique du pays. Mais le dénominateur commun de ces trois tranches reste la demande et  les manifestations incessantes pour l’obtention du statut de prisonniers politiques des années de détention afin de profiter des bénéfices de l’Equité et de la Réconciliation. Le ministre islamiste du PJD reste catégorique, persiste et signe non à ce statut ! 

 

                                                                                      Par le Pr A. NOUGAOUI

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