LE MIRAGE DES REVOLUTIONS ARABES

     Les cycles révolutionnaires se ressemblent beaucoup. Depuis le début de l’insurrection en Tunisie, les révolutions arabes rappellent le Printemps des peuples que connut l’Europe en 1848.Tout commence par surprise. à Paris jadis et à Tunis hier.

La révolution est contagieuse, toutes les capitales voisines sont touchées. Les mêmes  mots d’ordre, les mêmes espoirs de liberté. Les premiers pouvoirs touchés par la vague font leurs bagages, Louis Philipe à Paris, Ben Ali à Tunis. Les foules galvanisées semblent partout l’emporter, les dirigeants cacochymes quittent la scène, affolés. En 1848, le vieux chancelier autrichien Metternich fuyait Vienne dans un panier de lingère. Moubarak quitte Le Caire, dans un avion militaire. Et puis, vient le temps des désordres, des réactions, des massacres. Quelques mois après la révolution de Paris 1848, dans toute l’Europe, les armées des monarques répriment les peuples révoltés. L’ordre règne à Varsovie sous la botte russe, sans que la République française du poète romantique Lamartine intervienne.

Aujourd’hui, les mercenaires africains, et les groupes de l’E.I. , bien après le lynchage de Kadhafi, essaient,  par leur présence, de s’imposer dans un bain de sang ; les troupes d’Arabie Saoudite entrent à Bahrein pour imposer à la révolte chiite la répression sunnite sous l’œil courroucé des chiites iraniens.

En 1848, toutes les monarchies étaient hostiles aux révolutions et aidaient au rétablissement de l’ordre Aujourd’hui, la plupart des grands pays sont démocratiques et soutiennent les peuples révoltés. Mais quand la France, qui a été le plus loin dans le soutien des dictateurs chassés par leurs peuples au nom de la politique arabe de la France et la lutte contre l’islamisme « radical », veut se refaire une virginité démocratique en soutenant les rebelles libyens, syriens, et d’autres.

Les autres puissances refusent d’intervenir militairement. Sarkozy. se retrouve isolé : les Américains d’Obama ne disent pas oui, et les Allemands de Merkel disent carrément non. Le principe du respect absolu  des souverainetés nationales, cher à la diplomatie française, de Richelieu à de Gaule, a passé le Rhin.

Les révolutions arabes risquent de poursuivre leur chemin écrit en 1848.Comme à l’époque, ce sont des révolutions bourgeoises qui ont éclaté dans un continent en pleine explosion démographique, au milieu d’un chômage de masse et de la hausse vertigineuse des inégalités sociales. Le combat fut long et féroce. Un siècle de révolutions et deux guerres mondiales.

Aujourd’hui, on peut dire que l‘ordre règne de temps à autre, à Benghazi et à Bahrein, bien que la guerre continue à faire des  ravages féroces, dans la quasi-totalité du territoire libyen ; l’armée égyptienne a conservé le pouvoir en se débarrassant et  de Moubarack et de Morsi, la Tunisie, le Yemen ne savent pas toujours dans quels états ils vont sortir de leurs révolutions.

Et le mirage demeure et persiste, en face de peuples qui attendent avec leur patience et leur endurance habituelles./

DE VIVE VOIX : Mohammed Essahlaoui