COMMENT ARRIVE CHEZ NOUS LE MOUTON DE L’ AID AL ADHA ?
Mohammed BOUASSABA
De par le marché du mouton destiné au sacrifice le jour de l’ AID EL KEBIR ou Aid Al Adha ( la fête du sacrifice) qui crée une économie artisanale dans les pays musulmans où leurs populations deviennent temporairement des sociétés de consommation et où se développent plusieurs activités depuis l’aiguiseur de coutelas et de couteaux qui serviront ce jour à la boucherie, les charbonniers et les vendeurs de petits matériel de cuisson de viandes, jusqu’à leurs fabriquants et les producteurs des aliments du cheptel en passant par les épiciers qui vous offrent tous les ingrédients nécessaires à la préparation de festins, une ambiance particulière un peu plus d’une semaine avant ce jour sacré se crée dans les souks hebdomadaires, sur les plate-formes des banlieues des grandes villes, chez les éleveurs dans leurs fermes, sur des aereas des super- marchés où le prix est fixé au kilo. Quant aux paysans- éleveurs venus des campagnes lointaines et appelés ‘kessaba (pluriel de ‘kessab) abritent chez les propriétaires de garages loués chers dans les quartiers populaires des grandes villes leurs ovins pour les rapprocher des consommateurs. Ces locaux leur servent aussi de cuisines et de dortoirs où il ne peuvent pas fermer l’oeil sous l’exigence de la surveillance . Ils (les ovins) sont souvent de la même race provenant d’ une même région et transportés par des véhicules. Vous trouvez du Sardy du Bergui, la race de Timahdit, celle de Beni Khirane, celle de Beni Guil et autre, du chevreau ça et là avec pour une petite catégorie de consommateurs … Au Sud de l’ Oriental, l’ élevage en centaines de têtes ( un groupe de cent têtes est appelé Aassa qui veut dire canne) est pratiqué par des nomades en pleine nature où le cheptel passe les nuits à la belle étoile, surveillé des prédateurs par des chiens et des bergers.
Vous vous présentez sur ce lieu de vente chez les uns et les autres, tantôt pour admirer ces animaux, tantôt pour connaître le milieu de leur élevage (lmargad) et les types d’aliments qui leur sont donnés depuis quelques mois pour les engraisser, leur âge ( ould laam ou tni ou rbai… – âgé de moins d’ un an, de deux ou de quatre ans…), vous expliquent les éleveurs et vous rassurent de la bonne qualité des aliments qui leur est donnée, des fois en vous jurant, les prix des différentes tailles ou selon les âges dans chaque espèce et particulièrement celui sur lequel est porté votre choix et qui vous attire pour l’acheter. Ces prix voient de légères augmentations tous les ans en raison de celle des aliments, rare où les prix baissent ( cas de celui de la region de l’Oriental l’an dernier à cause de la pandémie causée par le Covid 19 où la demande a baissé ). Soyez heureux si vous ne tombez pas entre les mains d’un intermédiaire appelé CHENNAQ (qui expose le mouton en le tenant par le cou la tete levée vers le haut) qui pourra vous deplumer ou vous arnaquer. Le rôle joué par ces intermédiaires qui manipulent les prix et dans la plupart des cas profitent plus que l’éleveur . Ni le consommateur ni l’éleveur ne profitent de ce système de commercialisation des moutons. Passons !…
Généralement le consommateur désire le plus jeune appelé dents de lait ( snane lahlib). Vous lui palpez les flancs des cuisses, la poitrine, la face intérieure de la queue d’abord pour voir s’ il est bien engraissé et s’ il porte assez de viande, ensuite vous l’ examinez pour répondre à ce qui a été recommandé par le Prophète Sidna Mohamed (PRIÈRE ET SALUT SUR LUI) : corné, ni blessé par son semblable, ni borne, doté d’ un vif regard, bien dressé sur ses pattes, une queue dépassant légèrement les hautes articulations des pattes postérieures, le corps robuste couvert d’une propre et douce laine… La recherche du mouton idéal n’est pas une simple affaire pour fêter l’Aïd Al Adha. C’est une véritable et sacrée mission pour le chef de famille qui doit satisfaire sa petite famille et rejouir les enfants qui attendent son arrivée avec impatience. Certains parents à bas revenus assument pour supporter cette charge et les dépenses et les dépenses qui en découlent .
Une fois que vous portez votre choix sur ce que vous désirez, vous demandez le prix qui, chez les uns sont abordables, chez d’autres un peu élevé et que vous débattez entre acheteur et vendeur pour arriver à vous entendre sur un prix qui arrangerait les deux parties et conclure le marché . Certes, vous êtes satisfait, l’ éleveur aussi qui vous dit Allah yrabbah en vous serrant la main (marché conclu) avec un grand sourire et perçoit son argent avant qu’ il ne vous cède la marchandise que les admirateurs et les curieux vous demandent son prix d’achat (Jadis apres entente sur le prix, l’ éleveur prenait une poignée de terre du sol qu’il mettait dessus l’ animal en signe d’ accord).
Mais dans quelles conditions le petit éleveur vous a-t-il fait arriver le bel animal qui va vous offrir un bon BOULFAF et une excelente viande que vous allez preparer de differentes façons en oubliant de partager avec le pauvre comme il a été recommandé par notre Prophète Prophète ? Généralement l’éleveur possède un troupeau de brebis qui, tous les ans produisent des agneaux qu’ il entretient depuis leur naissance jusqu au terme de leur maturité qui repondra à leur sacrifice. Ils se nourrissent de lait en tetant leurs mères durant leurs deux ou trois premiers mois puis apres leur sevrage par des herbes dans la nature sur de vastes pâturages où ils sont conduits et surveillés par lui meme ou par un berger ( les négociants les achetent chez ces derniers âgés de six à neuf mois pour les engraisser). Trois mois avant la fête ils sont retenus dans des étables pour être engraissé d’ un mélange à base de céréales et de pulpe de soja ou de betterave, le tout additionné au son et servi dans des mangeoires, du fourage à base de luzerne et / ou de la paille, seront leur plat de résistance, un abreuvoir est constamment mis à leur disposition. L’ éleveur est toujours là pour contrôler, vérifier et nettoyer le parterre de la bergerie pour assurer à son cheptel des conditions de vie adéquates et une bonne hygiène. Le vétérinaire qui le vaccine, à son tour fait son contrôle pour lui assurer de parfaites conditions sanitaires . Le paysan- éleveur, n’ a de préoccupations que le bien être de son cheptel en oubliant le sien. Souvent crasseux, Mal vêtu et mal chaussé, Il dort mal et se nourrit mal. Un état qu il traîne avec lui toute l’ année depuis l’ allaitement de l’agneau jusqu au moment où il vous l’ a vendu tout en niant la belle vie sauf tout un processus accompagné de sales besognes. Quant à lui il est satisfait ou pas selon le prix du marché établi par l’ offre et la demande. Ne mérite-t- il pas un bonus sur le Prix Convenu ? La veille de l’Aid il rentre chez lui et rebelotte… PAUVRE PAYSAN-ELEVEUR !…
Quant à moi je vous souhaite une bonne fête avec la joie de vivre ses rituels en famille en vous disant MABROUK AIDKOUM.
Il est à rappeler qu’ il faut respecter les conditions sanitaires imposées par le Covid 19 et celles nécessaires pour assurer une bonne hygiène lors du sacrifice, du dépouillement de votre mouton et de la conservation de sa viande.
Mohammed Bouassaba, Acteur Associatif et Auteur / Rabat
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