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Comment optimiser les « Urgences » pour les personnes atteintes de maladies rares souvent en « déshérence »

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La seconde journée des maladies rares était organisé sous le thème des situations d’urgence que peuvent connaître les patients atteints de maladies rares  (rares mais fréquentes en nombre de malades : 1,5 million au Maroc). Alors que le Maroc connaît encore bien des défaillances pour les  soins d’urgence (absence d’un service national publique de type SAMU comme en France, défauts de services téléphoniques fixes de contact, ces malades en état critique se retrouvent alors face à un double défi : prise en charge de l’urgence et  prise en charge de la maladie rare (que peu de professionnels de santé appréhendent bien). Les débats de la manifestation, faisant dialoguer médecins et associations de malades ainsi que les malades eux-mêmes,  ont permis de déboucher sur un certain nombre de propositions pratiques  propres à améliorer la situation des malades comme l’institution de cartes personnelles pour  les patients souffrant de maladies rares comportant les informations et recommandations utiles en cas d’urgence, l’amélioration de l’accès à certaines analyses, à des médicaments particulier, la création de centres spécialisés…

SOMMAIRE

I/ Eclairage  sur des pathologies susceptibles de crises potentiellement mortelles de décompensation aigue

II/ Les préconisations particulières issues des débats

III/ Les grandes priorités de l’Alliance pour le Maroc

IV/Pour en savoir plus : 1/Un exemple de maladie métabolique souvent fatale au Maroc : la maladie de Pompe, 2/  Qu’est ce que l’Alliance des Maladies Rares, 3/ Revue de presse de la seconde journée et de la journée internationale des maldies rares 2019.  

L’alliance des maladies rares au Maroc (AMRM) a organisé, sous le patronage du Ministère de la Santé, sa deuxième journée nationale des maladies rares, le Samedi 23 février 2019, à l’université Mohamed VI des sciences de la santé de Casablanca et en partenariat avec Sanofi Genzyme, sur le thème des situations d’urgence  appelées plus précisément : « les maladies rares à décompensation aigue ».

Les maladies rares sont en général  chroniques et évolutives, mais certaines d’entre elles peuvent provoquer la rupture de l’équilibre que l’organisme a trouvé pendant une certaine période pour faire face à cette pathologie ou à un trouble lié quelconque : c’est la décompensation survenant de façon inopinée et susceptible de donner un œdème cérébral, des convulsions, des vomissements inexpliqués… voire un coma. Cette situation critique pose alors un double défi  si la pathologie sous jacente n’est pas  diagnostiquée : cette fraction de maladies rares peut menacer le pronostic vital et mener la personne atteinte en réanimation ; préserver le pronostic vital repose alors sur un diagnostic urgent et précis et sur la mise en route d’un traitement adapté. Cette prise en charge nécessite l’intervention coordonnée d’une équipe multidisciplinaire composée au moins selon les cas, outre l’urgentiste, du médecin généraliste « de famille », d’un pédiatre, d’un interniste« métabolicien », d’un biologiste, d’un diététicien spécialisé…

A ce propos, on ne peut que regretter le manque au Maroc de spécialistes du métabolisme (les métaboliciens), en particulier pour les adultes.  Rappelons que Les troubles métaboliques sont les perturbations du fonctionnement de l’organisme liées aux affections dues à l’accumulation dans les cellules de quantités anormalement élevées de substances normales ou pathologiques (lipides, glucides, calcium, etc.).  Beaucoup de maladies rares connaissent ce genre de troubles (comme une grande partie de celles examinées lors de la journée).

I /Un éclairage sur certaines  pathologies susceptibles de crise potentiellement mortelles : la décompensation aigue

Cette journée a eu notamment pour  objectif de faire un éclairage sur :

Les maladies du cycle de l’urée qui posent un réel problème de santé publique au Maroc malgré leur rareté du fait de leur méconnaissance, de l’indisponibilité de certains produits et d’un manque de spécialistes, métaboliciens en particulier des adultes. Le cycle de l’urée est une voie métabolique permettant la transformation de l’ammoniaque, molécule toxique pour le système nerveux et le foie, en urée, molécule non toxique, excrétée dans l’urine. La décompensation hyperammoniémique en cas de maladie du cycle de l’urée est une urgence vitale qui, en l’absence de prise en charge immédiate et spécifique, peut conduire à des séquelles neurologiques irréversibles, voire à un coma ou au décès.

– Les porphyries, un groupe de maladies (une affection caractérisée par la présence, dans l’organisme, de quantités massives de porphyrines, molécules précurseurs de l’hème, une partie non-protéique de l’hémoglobine) dont certaines peuvent se compliquer de paralysies inopinées surtout après la prise de certains médicaments ;

L’hyperplasie congénitale des surrénales, une maladie (une anomalie des glandes surrénales situées au-dessus des reins) qui doit être dépistée à la naissance et qui peut se compliquer d’une déshydratation ;

– La maladie de Pompe, une affection musculaire enzymatique (maladie génétique progressive et souvent fatale) qui a bénéficié récemment d’un nouveau traitement ;

– Les actualités et les perspectives des thérapies géniques.

II/ Des préconisations issues des débats

Les interventions et débats qui ont animé la journée ont permis de conclure à la nécessité  de mettre en œuvre au Maroc une série de mesures concernant les maladies rares en général et les situations d’urgence en particulier :

1/ la mise en place d’une spécialité ou sous-spécialité de  médecine métabolique pour enfants et également pour adultes (à destination des pédiatres et internistes) ;

2/ un encouragement et une mise en place à l’intention des diététiciens d’une formation à la nutrition spécifique des pathologies d’erreurs du métabolisme ;

3/ l’amélioration de l’accessibilité aux médicaments (notamment aux épurateurs de l’ammoniac pour les pathologies du cycle de l’urée). La direction du médicament et de la pharmacie vient malheureusement de suspendre les Autorisations Temporaires d’Utilisation (ATU) !

3/ l’amélioration de l’accessibilité des examens de l’ammoniaemie  partout  au Maroc

5/ la réalisation de centres de référence, privés ou publiques, des maladies héréditaires du métabolisme ;

6/ l’institution de cartes personnelles pour  les patients souffrant de maladies rares comportant les informations et recommandations utiles en cas d’urgence ( les gestes à faire ou ne pas faire, et ce dans toute situation d’urgence, liée ou non à leurs pathologies)

III/ Une réaffirmation des mesures prioritaires (maladies rares)  préconisées par l’AMRM   

La manifestation a permis enfin de réaffirmer les mesures que l’Alliance des Maladies Rares au Maroc (AMRM) estime nécessaire de promouvoir au Maroc depuis sa création officielle en 2017 : les maladies rares doivent s’inscrire au rang de priorité de santé publique  dans un plan national pour les maladies rares au Maroc, comme cela s’est déjà fait eu Europe. Celui-ci formulerait  les objectifs et les mesures à prendre, notamment dans les domaines de la formation et de l’orientation des patients avec le développement de centres de référence nationaux pour l’expertise et de centres de compétences locaux pour les soins.

Face d’abord au défi principal de l’errance diagnostique des patients au Maroc, l’Alliance estime ainsi qu’il faut progressivement :

1-            Encourager à la mise place d’un dossier médical unique et inciter les marocains à avoir un médecin référent, le « médecin de famille » qui connaît tout de son patient pour mieux centraliser les informations et coordonner les soins, comme cela existe en Europe.

2-            Mieux promouvoir la médecine clinique. Cela passe notamment par un gros effort de formation vers 4 spécialités en pointe dans le combat des maladies rares : la neurologie, la pédiatrie, la dermatologie et la médecine interne.

Une réflexion paraît souhaitable d’ailleurs sur la place de cette dernière spécialité dans notre système de santé. La médecine interne est en effet, par définition la discipline médicale qui s’occupe du diagnostic des maladies complexes (et donc des pathologies peu fréquentes et des maladies rares). Méconnue du grand public marocain, le nombre d’internistes au Maroc est dérisoire, moins de 250, soit moins de 2 % des spécialistes du pays.

3-            Encourager les médecins, qu’ils soient du secteur public ou privé, à « adopter » une maladie ou un groupe de maladies pour la mise en place à terme de centres de référence nationaux pour l’expertise et des centres de compétence pour les soins.

4-            Organiser le dépistage néonatal systématique de certaines pathologies, cela afin d’éviter les handicaps qu’elles engendrent : il en est ainsi de l’hypothyroïdie congénitale et de la phénylcétonurie  qui peuvent être soignées facilement, respectivement par un traitement peu onéreux (la lévothyroxine, une hormone thyroïdienne) et par un régime alimentaire spécifique (un régime pauvre en phénylalanine, un acide aminé).

Par ailleurs il faut en ce qui concerne plus directement les malades et leurs familles :

5-            Mener des grandes campagnes de sensibilisation. Cela passe en particulier par un effort important de communication en langue arabe. L’Alliance des maladies rares au Maroc a d’ailleurs déjà réalisée des fiches de vulgarisation sur plus de 80 maladies rares.

6-            Encourager la constitution des associations des malades pour que ces dernières puissent soutenir les patients et leurs familles et accomplir, pour chacune des maladies, ce travail de sensibilisation auprès du public

7-            améliorer la prise en charge des patients par les assurances maladies, en considérant toutes ces maladies comme « affection de longue durée », ce qui n’est pas le cas pour la plupart actuellement.

Casablanca le 27 mars 2019

Dr MOUSSAYER KHADIJA  الدكتورة خديجة موسيار

اختصاصية في الطب الباطني و أمراض  الشيخوخة   Spécialiste en médecine interne et en Gériatrie

Présidente de l’Alliance Maladies Rares Maroc  رئيسة ائتلاف الأمراض النادرة المغرب
Présidente de l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS)

رئيسة الجمعية المغربية لأمراض المناعة الذاتية و والجهازية

Vice-présidente du Groupe de l’Auto-Immunité Marocain (GEAIM)

Chairwoman of the Moroccan Autoimmune and Systemic Diseases Association

Membre de la Société Marocaine de Médecine Interne (SMMI)

 

IV/ POUR EN SAVOIR PLUS :

1/Un exemple de maladie métabolique touchant des personnes à tout âge : la maladie de Pompe 2/  Qu’est ce que l’Alliance des Maladies Rares 3/ Revue de presse de la seconde journée  et de la journée internationale des maladies rares (le 28 février)

1/ La maladie de Pompe  une maladie rare touchant les individus à tout âge 

La maladie de Pompe est une maladie  neuromusculaire héréditaire qui provoque progressivement  une altération des muscles, principalement squelettiques et cardiaque.

La pathologie est causée par la défectuosité génétique de fabrication d’enzymes (principalement alpha-glucosidase acide) dont le rôle est de transformer le glycogène (une forme de sucre emmagasiné dans les cellules musculaires partout dans le corps) en glucose : cette enzyme est alors absente ou insuffisante.

La maladie présente des aspects très variées  allant de la forme pédiatrique débutant dans les premiers mois de la vie (environ un tiers des cas avant 6 mois) et caractérisée par une atteinte musculaire et cardiaque sévère jusqu’à des formes débutant à tout âge et habituellement sans atteinte cardiaque. La prévalence de la maladie est estimée à 1 pour 40000 personnes. En France, moins de 200 patients sont concernés par cette pathologie. On peut donc estimer par analogie qu’elle atteindrait une centaine de personnes au Maroc.

Les facteurs de risque héréditaire

Pathologie héréditaire, les facteurs de risque de développer résident exclusivement dans le fait que les deux parents soient porteurs du gène défaillant : il s’agit en effet d’une transmission héréditaire autosomique récessive. D’où l’intérêt d’un diagnostic prénatal  pour connaître les éventuels risques que l’enfant développe cette atteinte. Il repose sur une mesure de l’activité enzymatique.

 Symptômes, évolution et diagnostic

Le diagnostic doit être effectué normalement au plus vite.

La forme infantile de la maladie est généralement plus facile à identifier en raison des symptômes uniques qui orientent directement le diagnostic et en priorité d’une hypertrophie du muscle cardiaque très significative. Le diagnostic de cette forme de la maladie doit être fait en urgence et le traitement doit être mis en place dans les meilleurs délais. En effet, dans ce contexte, le pronostic vital de l’enfant est rapidement engagé.

Chez les enfants plus âgés et les adultes, il est plus difficile de diagnostiquer la maladie. Certains symptômes d’apparition lente peuvent passer inaperçus. En outre, la maladie de Pompe peut être confondue avec d’autres pathologies musculaires aux symptômes similaires. Pour cette forme « tardive », les patients risquent de devenir dépendants (fauteuil roulant, assistance respiratoire, etc.) en absence de traitement.

 Un traitement relativement récent

Depuis le début des années 2000, la thérapie enzymatique substitutive (TES), l’Alglucosidase alfa (Myozyme),  permet de traiter les causes, sans pour autant guérir la maladie, en fournissant à l’organisme l’enzyme manquante. Elle permet de ralentir la progression de la faiblesse musculaire et améliorer la fonction musculaire. En l’absence de traitement pour les nourrissons, le décès est rapide, en général au cours de la première année. Lez données médicales permettent de penser que plus on débute le traitement tôt après l’apparition des premiers symptômes, meilleurs sont les résultats. L’évolution de la maladie peut être ralentie ou arrêtée et l’endommagement ultérieur des organes peut être évité, ce qui permet à de nombreux patients de mener une vie presque normale.

Au nombre des autres traitements de soutien, mentionnons : un régime alimentaire adapté, les thérapies respiratoires et l’assistance ventilatoire; la physiothérapie

La situation au Maroc

Cette pathologie est encore malheureusement très peu connue au Maroc et de ce fait pose un grave problème de diagnostic, ce qui ne peut donner lieu qu’à une mortalité sévère. Le traitement est de plus très coûteux ce qui a amené l’industrie pharmaceutique à mettre en place des programmes d’aide pour ce type de maladie.

2/ Qu’est que l’Alliance des maladies rares ?

L’association des maladies auto-immunes et systèmiques (AMMAIS) est  à l’origine de la création en 2017 de l’Alliance des Maladies Rares au Maroc (AMRM) avec d’autres associations de patients atteints de maladies rares. Elle s’est inspirée des modèles des pays plus développés, où des associations de malades atteints de maladies rares et des malades dépourvus d’association se sont unis depuis plusieurs années en « Alliances », telles  la France avec l’Alliance Maladies Rares ou la Suisse avec Proraris. Les autres associations fondatrices de l’Alliance sont : l’association Hajar des déficits immunitaires primitifs,  l’association marocaine du spina Bifida et des handicaps associés (ASBM),  l’association des amis des myasthéniques (AAMM), l’association  marocaine du syndrome de Rett (AMSR), l’association marocaine de la fièvre méditerranéenne familiale (AMFM)  et le groupe d’étude de l’auto-immunité Marocain (GEAIM).

L’Alliance collabore étroitement avec beaucoup d’autres associations œuvrant dans le domaine ou non des maladies rares  comme l’Association de solidarité avec les enfants de la lune,  l’Association Marocaine de Mucoviscidose… Elle a par vocation à rassembler toutes les autres associations œuvrant dans le domaine des maladies rares.

Enfin l’Alliance entretient des relations d’amitié, de solidarité et de collaboration avec  de nombreuses associations  et organisations mondiales de malades à travers le monde.

3/ Revue de presse de la seconde  journée et de la journée internationale  des maladies rares 2019

Revue non exhaustive des articles et des communications dans les médias reprenant des communiqués, dossiers et déclarations de l’Alliance des maladies rares au Maroc.

Oujdacity (et Medcursus aussi) figure en bonne place dans cette revue. Qu’il en soit vivement remercié ainsi que son équipe de rédaction toujours très réactive.

 

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