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Graphène et Energie Solaire

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Ils ont dit à propos du graphène:
“Electrons travel through it so fast that their behaviour is governed
by the theory of relativity rather than classical physics.”
(The Economist, 2006)
“We’ll have to rewrite the theory of metals for this problem.”
(Physics Today, 2006).

Comme son nom l’indique, le graphène s’obtient à partir du graphite et il s’agit d’un simple feuillet en deux dimensions, composé d’atomes de carbone arrangé selon un motif hexagonal. Avec leur épaisseur d’un seul atome de carbone, on pensait que de tels feuillets, qui forment par leur empilement le graphite de nos mines de crayon, étaient physiquement impossibles. Un tel matériau contredisait en apparence un résultat mathématique en physique de la matière condensée connu sous le résultat de Mermin-Wagner. Ce dernier était une formulation précise d’un argument étroitement lié aux notions de symétries brisées, donné par le physicien russe L. Landau, qui a tenté de démontrer l’impossibilité de bâtir un réseau cristallin à deux dimensions. Cette sommité de la physique du 20ème siècle est décédée en avril 1968, après maintes contributions à divers domaines de la physique moderne et après avoir côtoyé la totalité des grands visages de cette physique moderne Dirac, Heisenberg, Pauli, Bohr, Born, Peierls et bien d’autres.
Le prix Nobel de Physiqe de 2010 est revenu à A. Geim et K. Novoselov du centre de recherche pour la Mésoscopie et des Nanotechnologie de l’université de Machester pour leur obstination à aller contre le courant fortement instruit et prédit par Landau. Leur découverte du graphène en 2004, a mis fin à toutes les spéculations scientifiques du oui ou non sur la possibilité de créer un réseau 2D. Rétrospectivement, on sait bien que cette impossibilité de Landau ne s’applique pas si le réseau est parcouru par des ondulations. Ce matériau nouveau est constitué donc selon un schéma où le carbone est l’unique atome de base, structuré dans une géométrie hexagonale, comme une juxtaposition de cycles benzénique tout au long de l’édifice. Transformer ce feuillet par enroulement autour d’un axe de révolution permet d’obtenir un cylindre creux qui porte le nom de NanoTube de Carbone (NTB). C’est un nouveau matériau doué de propriétés physico-chimiques exceptionnelles qu’aucun autre matériau n’a possédé jusqu’à présent. Dans cet état, on peut lui greffer, ou le doper de plusieurs espèces chimiques ou biologiques au même temps pour le doter d’une multitude de fonctions simultanément. On parle de techniques de décorations des NTCs (graphène enroulé), qui commence à donner déjà des designs qui se trouvent au stade de la finalisation en vue de leur commercialisation.
Des travaux de laboratoire montrent que des transistors en graphène sont potentiellement capables de détrôner les transistors en silicium, ouvrant la voie à des ordinateurs plus performants car plus rapides et plus petits. Etant pratiquement transparent avec 98% du flux lumineux transmis, et donc à peine 2% partagé entre faisceaux réfléchi et absorbé, le graphène est aussi un très bon conducteur, et sa conductivité vaut plusieurs fois celle du cuivre. Ceci lui permet d’être le meilleur candidat pour la réalisation des écrans tactiles, des panneaux lumineux et certainement des cellules solaires. Sur le plan mécanique, sa résistance à l’attraction est 200 celle de l’acier, et sur le plan thermique on s’attend à ce que mélangé dans une proportion de 1% seulement à de la matière plastique, sa résistance thermique devrait augmenter de 30°c. Nous sommes à l’aube d’intéressants matériaux composites au graphène qui devraient apparaître dans un avenir proche, avec des applications dans les satellites, les avions et les voitures.
Sur le plan électrique, des chercheurs de l’équipe de l’université de du Maryland viennent de confirmer que la mobilité des électrons dans le graphène était supérieure à celle dans les autres matériaux dans des conditions de températures ordinaires. Cette découverte vient confirmer tout l’intérêt porté sur ce matériau par les chercheurs et les industriels  pour l’évolution des semi-conducteurs. Les mesures de cette équipe ont montré que les vibrations thermiques n’ont que des effets exceptionnellement faibles sur la conduction des électrons dans le graphène. En général, dans un matériau, l’énergie thermique fait vibrer les atomes et augmente donc la résistivité intrinsèque, et limite la conductivité maximale dans celui-ci. Cette résistivité ne peut être réduite que par refroidissement du matériau. Ainsi ces mesures montrent que la résistivité du graphène à température ambiante est de l’ordre de 10 nano Ohm-mètre, alors que l’argent, le meilleur matériau jusqu’alors présente une résistivité proche de 16 nano Ohm-mètre. Pour le silicium à la base de tous les designs technologiques existants, ainsi que les cellules solaires, on se réfère en général à la mobilité des porteurs de charges exprimée en cm2/Vs (centimètres carré par Volt seconde), et elle est de 1400 contre 200 000 pour le graphène.
C’est un sujet scientifique et technologique très riche, surtout depuis 2010 l’année d’obtention du prix Nobel. Trop de recherches ont été et continuent à être menées pour explorer ce matériau à l’échelle de toutes les propriétés physico-chimiques. Dans ce même contexte, des chercheurs de l’Institut des sciences photoniques de Barcelone (ICFO), ont mis en évidence dans le cadre d’un projet faisant intervenir plusieurs équipes de renommée internationale, que le graphène est aussi un matériau  performant pour la conversion de l’énergie solaire en courant électrique. L’expérience qu’ils ont pu réaliser a démontré que pour chacun des photons absorbés, plusieurs électrons chauds sont produits. Ces genres d’électrons sont connus surtout par les mécanismes d’avalanche déclenchés dans les hétérojonctions soumis à des champs intenses. Leur vitesse de conduction est de 1 million m/s, soit un rapport de 1/300 par rapport au photon. L’ensemble de données exposées comme étant ses caractéristiques, justifie bien l’appellation qui lui est attribuée par les scientifiques comme « matériau miracle ». Ces électrons sont d’abord à collecter, ensuite à canaliser pour donner naissance à un courant électrique, et pour cela nombreuses sont les étapes qui restent à franchir avant de contrôler tout le processus, mais le travail présenté ouvre des perspectives prometteuses.
D’après ce qui précède, le graphène en couche de carbone monoatomique, possède de nombreuses propriétés que les chercheurs du monde entier commencent tout juste à décrypter. Le travail conduit par les chercheurs ICFO, du MIT, du Max Planck Institute for Polymer Research a permis d’ajouter une nouvelle compétence au graphène, qui est de convertir la lumière en électricité. C’est un effet bien connu en sciences des matériaux, sous le nom de l’effet photoélectrique, dont l’explication théorique en 1905 par Einstein lui a valu son Prix Nobel. Les matériaux capables de produire un tel effet sont actuellement étudiés de très près car ils sont le composant essentiel des panneaux photovoltaïques. L’objectif des chercheurs est de trouver un matériau qui assure le meilleur rendement dans sa conversion entre énergie lumineuse et énergie électrique. Le travail de ces équipes place le graphène comme un matériau prometteur, car il produit plusieurs électrons utilisables pour un seul photon absorbé, en comparaison avec la plupart des autres matériaux  qui ne produisent qu’un seul électron par photon. Ensuite le graphène présente un bon potentiel d’absorption sur l’ensemble du spectre visible, sachant tout de même que plus l’énergie des photons incidents est élevée, plus il y a d’électrons et donc de courant produit.
Malgré ces avantages, il existe quelques barrières à lever pour faire du graphène un matériau parfait pour une utilisation dans les panneaux solaires. C’est tout d’abord un matériau transparent, c’est-à-dire même s’il convertit très bien les photons absorbés, il n’absorbe qu’une très faible de l’énergie lumineuse qu’il reçoit (2%). Ensuite, il s’agit de récupérer efficacement les électrons produits suite à la conversion pour en faire un courant électrique utilisable.
Parler de l’effet photoélectrique, c’est parler de l’effet de transport qui est un effet lié à ce qui se passe autour du ce qui est appelé dans le jargon scientifique niveau de Fermi et dans les points de Dirac. Dans le graphène, les électrons se déplacent 300 fois plus lentement que les photons, par conséquent, la mécanique quantique a son mot à dire mais pour décrire le processus d’électrons chauds, c’est-à-dire hautement énergétiques. Leur description par l’’équation de Schrödinger (utilisée pour les particules de faibles énergies) n’est plus valable, et les conditions auxquelles ils sont soumis imposent de les décrire mathématiquement par l’équation de Dirac. Ce sont les analogues de particules relativistes sans masse. Il en résulte que l’analogie de certains phénomènes ordinairement rencontrés en théorie quantique relativiste des champs pourrait s’y manifester. On peut donc penser à simuler de la physique des particules avec le graphène.

Par Le Professeur Abdelkarim NOUGAOUI
Directeur de Laboratoire de Recherche de Physique
à  l’Université Mohammed Premier     Oujda

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