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Les oubliés d’Oujda

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Najat est une femme dans la quarantaine. Elle habite un quartier délabré dans une des banlieues éloignées de la ville d’Oujda, proche de la frontière Maroco-Algérienne.

 

Elle vit seule, et doit subvenir aux besoins de son fils, qu’elle a eu avec son mari. Je dis bien mari, et pas ex-mari, car, malgré ses aventures extra conjugales, son mariage avec une deuxième femme, et ses séjours fréquents en prison, il refuse de donner le divorce à Najat.

 

Najat travaille comme femme de ménage dans trois maisons différentes, six jours par semaine. Elle gagne mille deux cents dirhams par mois. Elle doit payer le loyer de sa chambre (cinq cents), l’électricité (deux cents), l’eau potable (cent-quatre-vingt). Elle doit aussi se nourrir, elle et son fils, acheter des médicaments … Elle ne gagne toujours que les mille deux cents dirhams cités précédemment, et les quelque trois cents vingt dirhams qui lui restent sont difficiles a étirer. L’équation est inégale, il y a un trou, un fossé qu’elle doit combler à chaque fin de mois.

 

La maison, ou plutôt la masure, dont elle partage les chambres avec trois autres familles, a eu d’importants dégâts lors des dernières pluies, « Le plafond est rendu comme une passoire! », dit-elle, tout en continuant à faire les travaux ménagers dont elle s’occupe. « Mais ce n’est pas urgent … ce qui m’inquiète le plus, c’est la hausse des prix ». La facture d’électricité est exorbitante, et les prix des produits de consommation augmentent, alors que le revenu est le même.

 

L’une de ses voisines, une colocataire, n’y arrive plus depuis bien longtemps. Elle à des enfants à charge, son mari gagne a peine 60 dirhams lors d’une bonne journée de travail sur les chantiers ou dans les dépotoirs. Il lui arrive des fois d’enfiler sa djellaba, et d’aller mendier de quoi acheter du pain pour nourrir sa famille.

 

Une autre, n’ayant plus qu’un seul rein, et ne bénéficiant d’aucune assurance ni d’aide significative … Travaille dur, pour arriver à payer ses séances d’hémodialyse. Si elle ne va pas travailler, elle ne pourra plus les payer …

 

Au Maroc, pays qui connaît toujours un taux de pauvreté alarmant (et controversé!), les foyers dirigés par des femmes sont désavantagés. Et dans la région de l’oriental plus particulièrement. Une femme divorcée, une veuve, une mère célibataire, n’ont pas le droit aux deuxièmes chances.

 

Revenons à Najat. Cette femme, dont le quotidien est déjà assez rude, se fait voler de chez elle. La vieille télévision dans laquelle elle a mis l’épargne de plus d’une année, la couverture douillette qu’elle a acheté pour elle et son fils, son ancienne bague de mariage … N’ayant pas de compte bancaire, elle transporte désormais le peu d’argent qu’elle gagne, sur elle.

 

Un jour, en se rendant à son travail, elle est suivie par deux jeunes hommes. Elle presse le pas, mais ils arrivent à sa hauteur.  Ils l’arrêtent, l’un des deux la menace discrètement avec un couteau, l’autre lui prend son petit portefeuille. Elle supplie, c’est tout ce qu’elle possède, elle se débat … L’homme armé la frappe avec son couteau, il vise le cœur. Un coup de chance : elle portait plusieurs épaisseurs, il n’a pas atteint la chair.

 

Najat s’effondre, elle pleure, implore les cieux. Il y a-t-il un Dieu qui peut entendre ses cris désespérés, la protéger, l’aider à avancer? Elle est la, seule, dans une ville gouvernée par des gangs de rue, sans le sous, sans avenir…

 

Elle reprend ses forces, et son courage, et reprend la route du travail. Elle se fraye prudemment un chemin dans la ville-jungle qu’est devenue Oujda, ou sévit la loi du plus fort, du mieux armé, du mieux drogué. En survolant les quartiers quasiment déserts, on ne voit plus de gardiens de la paix. Les enfants ne jouent plus dans la rue, les parents ne s’aventurent plus à les y laisser en liberté. Plus de promenades en famille, de jogging entre amis. Les commerçants ferment les boutiques des la tombée du jour, et les cafés sont protégés par des agents de sécurité en plein jour.

 

La terreur sillonne la ville silencieusement, pour choisir ses victimes parmi les innocents qui ont eu le malheur de se trouver sur son chemin. Elle les agresse froidement, elle est inconsciente de l’angoisse ou baignent désormais ses concitoyens, elle n’a pas toute sa tête.

La jeunesse intoxiquée par les drogues de contrebande, recrutée par les nouveau gangs de rue d’Oujda, ont installé une mafia sans merci.

 

On croirait quasiment que depuis le début des manifestations au pays, le groupe du vingt février et autres formations ont volé la vedette un peu partout. On laisse de coté des fléaux qui continuent de ronger la vie paisible de beaucoup de  marocains.

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6 Comments

  1. samir
    02/12/2011 at 11:53

    très bon article, digne d un bon roman qui a coups sur pourrai devenir un best seller, mais dans la description de ma ville OUJDA est tres,tres,tres loin de ce qui est dit par l auteur de cette article,ou bien exist-il une autre ville au nom de OUJDA ???

  2. Zoheir
    02/12/2011 at 22:55

    cher Samir Oujda a changé,d ailleur toutes les villes.Que Dieu nous protège

  3. Ali
    03/12/2011 at 12:09

    Malheuresement c’est la realite dans cette region ou la societe a un niveau d’education tres bas. Cette societe tres masculine est degoutante. Je pense que les drois des femmes sont bafouees tous les jours et encore plus pour des veuves ou des femmes qui n’ont pas eu la chance de se marier. Cette societe ou le plus fort fait la loi. Cette societe bornee et limitee. Cette societe corrompu et qui ne veut pas se regarder dans un mirroir. cette societe, ma societe me degoute ! Cette societe qui drague la femme comme si c’etait un chien…

    Par contre le vendredi, tu les trouves tous a la mosquee a faire les gens purs et des qu’ils sortent de la mosquee, ils font et agissent de facon pire que le diable !

    O femme, malheuresement, vous vivez dans une societe de MXXXXX et si vous avez l’occasion de vous barrer en Occident (c’est les vrais musulmans !) alors, n’hesitez pas une seconde !

  4. mjidou
    03/12/2011 at 12:19

    Bravo pour cet article mais comme l’a dit « Samir » c’est quelque peu exagéré.C’est vrai que la petite délinquance est en hausse mais pas au point cité par Mme Soumia.C’est possible que ce soit une histoire vécue et si c’est le cas , la réaction ne peut être qu’amplifiée et c’est normal.
    Le problème majeur que cet article soulève est celui du manque flagrant de protection sociale des marocains et là il y a beaucoup à faire,d’ailleurs ce n’est pas par hasard que le Maroc a été classé 130 éme sur 167 pays au niveau mondial de l’IDH (l’indice du développement humain).
    D’autre part on ne peut pas dire que le Maroc est comparable au Mexique,à la Colombie ou à l’Albanie en matière de sécurité.

  5. mjidou
    04/12/2011 at 00:36

    Peut être que ce qui est arrivé à la dame a influencé le jugement très négatif sur ce qui se passe à Oujda. Ici ce n’est ni le Mexique,ni l’Albanie tout de même.Mais il faut noter que l’essentiel de ce qui a été décrit résume la précarité et le désarroi du quotidien d’une bonne partie des Oujdis . Le dernier classement du Maroc réalisé par le PNUD est flagrant (130 ém sur 167 états),ce classement concerne l’indice de développement humain ,le fameux IDH .La couverture et les aides sociales sont encore inexistantes pour une large majorité de nos concitoyens et dans ce domaine il y a effectivement beaucoup à faire.

  6. un Arabe
    20/12/2011 at 10:39

    les Marocains sont un peuple formidable qui mérite mieux!

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