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Le souk hebdomadaire d’Ain Sfa

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Zaid Tayeb

Il y a peu de temps, les chalands se rendaient au souk hebdomadaire d’Ain Sfa pour s’approvisionner en fruits et légumes et surtout en viande du jour. Les marchandises étaient posées en vrac à même le sol boueux de l’hiver, venteux et poussiéreux de l’automne ou brûlant de la canicule. Ils devaient se mettre à quatre pattes pour faire leurs achats. La viande, pendue à des potences de fortunes au moyen d’esses de fer rond, subissait la découpe sur une table de travail d’un autre âge. Disons qu’à la pauvreté des clients correspondait celle du souk et que l’homme est le produit de son milieu, que le spectacle n’avait rien d’offensant et de blessant pour l’œil.

Les choses ont changé depuis. Et en bien. Un marché moderne a été construit avec des abris couverts, des allées pavées, des boutiques avec potager en dur, éclairage public, trois grands portails qui peuvent recevoir toutes sortes de véhicules depuis les tri-porteurs jusqu’aux gros camions, le tout pour acheminer les marchandises vers les étals. Les responsables qui ont veillé à la construction de ce marché moderne n’ont pas oublié le bétail, le foin, les fourrages…auxquels ils ont aménagé un espace à eux. Les cafés, de grands espaces grouillant de clients et de badauds  y traitent leurs affaires ou tout simplement prennent un moment de repos le temps d’une parlotte dans une atmosphère de brouhaha et de rires bruyants.

Si le lieu a changé, en bien, les habitudes, elles, non, surtout les mauvaises. Ce cadre qui respire la modernité,  le progrès, l’ordre, se heurte aux refus de changement et d’intégration de certains marchands de certains produits  où la propreté et l’hygiène doivent primer. Après la fin des activités de vente et d’achat, le souk se vide de vendeurs et d’acheteurs. Les énormes portails sont tirés jusqu’au jour de marché qui aura lieu dans une semaine. Pendant cette semaine de sept jours et sept nuits, billots et tables de travail avec encore leurs esses qui servent de pendoirs, sont là, exposés aux facteurs climatiques : vent, soleil, pluie, poussière. A cela s’ajoutent les chiens et les chats qui viennent y faire le ménage en se régalant : ils se détectent de débris d’éclats d’os de têtes de veaux,  de morceaux de mous d’abats, de sang caillé et de tout un tas de déchets tombés aux pieds du marchand. Sans compter que les chats et les chiens trouvent un malin plaisir à relever la patte postérieure pour arroser les billots et les pieds des tables de travail. Il ne faut pas oublier d’ajouter à ce tableau les nuées de mouches qui s’abattent par  essaims bourdonnantd sur les produits destinés à la vente et les tables de travail  qu’elles décorent de manière dégoûtante et repoussante. Un liquide jaunâtre coule à travers les joints des lates qui forment la table de travail avant de finir par coulées nauséabondes sur le pavé.

La semaine suivante, le jour du marché, tout se passe comme si de rien n’était, comme si les billots et les tables de travail étaient bel et bien dans un lieu fermé, stérilisé. Allez donc demander au marchands d’abats le prix du foie avec ou sans crépine.

Zaid Tayeb

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