Depuis que Ain Sfa est Ain Sfa, Ain Sfa est restée Ain Sfa, jusqu’à l’arrivée à la présidence de sa commune d’un ‘’ homme du pays’’ épaulé par un vice-président également ‘’du pays’’ et un staff à la conduite irréprochable. Ain Sfa est restée Ain Sfa, veut simplement dire et de manière triviale qu’elle est restée comme elle était depuis que je la connaissais, et je ne la connais que trop bien, pour être moi-même un ‘’homme du pays’’ et pour y avoir fait ma première classe sur les bancs de sa petite école , dont il ne reste qu’une petite salle pour témoigner de l’état d’ abandon et de délabrement auquel elle a été livrée. Les seuls changements qu’elle avait connus étaient des changements qui avaient présidé à sa dégradation : ses chemins avec leurs nids de poule, poussiéreux et poudreux l’été, boueux et bourbeux l’hiver, sa source avec son abreuvoir et son bassin vaseux et bourré de gravats de toute nature où croupissait une eau verte, sa colline grise et nue, ses vergers et ses jardins maraichers livrés à la sécheresse et à l’oubli, son souk hebdomadaire presque vide de visiteurs et encore plus de denrées, ses boutiques depuis longtemps fermées et abandonnées, ses bouchers dont il ne restait que ceux sur qui le destin s’était acharné de manière méchante et qui avaient résisté à supporter ses coups, ses moyens de transport public jadis bondés de voyageurs et surchargés de poulets, de lapins, de grappes de balais de doum, de cabas pleins de légumes et de fruits, gémissaient dans l’attente de passagers qui se faisaient de plus en plus rares. La conjugaison des caprices de la nature et de l’indifférence des responsables à qui a été confiée la destinée de cette petite commune se sont succédé et coalisés pour faire sa misère et sa ruine. Et la ruine et la misère étaient tellement perceptibles qu’on ne pouvait ni cacher ni nier leur existence : Une atmosphère de deuil et de désolation s’était abattue sur Ain Sfa qui s’était dépeuplée et vidée. Elle était morte ! Et de la main de l’homme !

C’était une autre époque à présent révolue. Dieu merci.

A l’heure actuelle, Ain Sfa fait peau neuve. Elle ressuscite de ses cendres. Elle respire. Elle reprend vie avec ses rues goudronnées, ses trottoirs plantés d’arbres ornementaux, ses passages piétons, ses panneaux de signalisation, ses jardins, ses bancs publics, ses lampadaires flamant neuf, sans oublier les travaux d’aménagement de la source qui sont en phase finale. La vie reprend et avec elle les activités hebdomadaires. La foule se fait nombreuse et babillarde dans le souk où les visiteurs se bousculent pour s’approvisionner en marchandises, sur les bancs publics fraichement installés où ils parlent du temps et des récoltes, autour des tables des cafés pour siroter un thé à la menthe ou à l’absinthe.

Un grand hommage doit être rendu au président de la commune de Ain Sfa, à son bras droit et vice-président, à son staff qui complète l’équipe. A tout seigneur tout honneur, abstraction faite de sa couleur politique, car, après tout, ses prédécesseurs, eux aussi avaient une couleur politique mais ils n’avaient rien fait pour remettre debout une commune qu’ils voyaient s’effondrer ou à l’effondrement de laquelle ils avaient contribué.