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Application du schéma narratif au chapitre IV de la Boite à Merveilles

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Zaid Tayeb


La Boite à Merveilles, edition librairie des écoles- Casablanca

Chapitre IV- pages 56-70

Passage : Dans les premiers jours du printemps…Un silence suivit cette conclusion’’
La critique littéraire a classé les textes en genres et types. L’écrivain, quel que soit son niveau de compétence doit se soumettre aux règles de chacun de ces types. On peut donc affirmer que tous les textes narratifs fonctionnent de la même manière- avec quelques petites variantes- et comme tels ils doivent respecter le schéma narratif ou schéma quinaire à cinq étapes. Ce qui en est du typa narratif en est des autres types. Dans la présente étude, pour des besoins didactiques, je vais essayer d’appliquer le schéma narratif à un chapitre de la Boîte à Merveilles d’Ahmed Séfrioui.
A-Situation initiale : ‘’Dans les premiers jours du printemps (page 56)…une personne aussi considérable’’page62)
Les deux femmes, Lalla Zoubida et La Aïcha présentent chacune ses voisins et voisines. Sidi Mohammed, qui a perdu le titre de narrateur attitré au profit de personnage-auditeur, se contente d’écouter sa mère et son amie papoter.
B-Force transformatrice :’’Moulays Larbi (page62…Son pas résonna dans l’escalier’’ (page 62)
L’arrivée inattendue de Moulay Larbi vient changer le cours des évènements. La rupture de l’équilibre narratif annoncée par ‘’Moulay Larbi, le mari de Lalla Aïcha, arriva inopinément…’’1 vient à point nommé mettre fin à la discussion des deux femmes sur les voisins et voisines. Comme il est fréquent et presque de coutume que la perturbation soit annoncée par une expression de la soudaineté comme ‘’soudain, brusquement, tout-à-coup…’’, le narrateur ne fait pas exception à la règle et l’adverbe ‘’inopinément’’ vient suppléer à l’usage en vigueur. Ce mot, en plus de son pouvoir de permettre de passer d’une situation d’équilibre à une autre de trouble de manière brutale et inattendue, il souligne le caractère du respect des conventions en vigueur. En effet, Moulay Larbi n’avait pas l’habitude de revenir chez lui à cette heure de la journée surtout qu’il sait d’avance qu’il y a une femme étrangère à la maison annoncée au tout début du chapitre par ‘’Nous étions invités à y passer la journée’’2.

C-Action : ‘’Il pénétra directement (page63….Seuls les experts de la corporation peuvent comprendre l’objet du litige’’ (page 69)

C’est le fond même du type narratif où doivent être relatées dans leurs détails les différentes péripéties qui composent l’action.

Première péripétie: ‘’Il pénétra (page 63) …se tenir en société’’ (page 63)

Moulay Larbi, sachant que sa femme est en présence d’une invitée entre dans la chambre qui sert de cuisine et d’entrepôt. C’est là que sa femme va le rejoindre, laissant derrière elle l’enfant et sa mère.

Deuxième péripétie : ‘’Elle se leva (page63)….brodées de fleurs mauves et…’’(64)

l’absence de Lalla Aïcha crée un temps mort narratif que Lalla Zoubida comble à sa manière. Elle se lève, ouvre une fenêtre qui donne sur le patio et se retrouve face à face avec une femme qui ne tarde pas à lui raconter dans ses menus détails une sortie qui s’est mal terminée à cause d’un orage. En verité, ce récit ainsi intercalé dans celui qui se murmure entre Moulay Larbi et sa femme, constitue un récit dans le récit dont la seule fonction est de meubler le temps, après le vide laissé par la sortie de la maîtresse de maison.

Troisième péripétie : ‘’Lalla Aïcha vint nous retrouver (page 64)….et ne tardait pas à m’endormir’’ (page 66)

Dès que Lalla Zoubida s’aperçoit du retour de Lalla Aïcha, elle abandonne la voisine bavarde et revient regagner sa place. Lalla Aïcha demande alors à son amie de changer de place, de se mettre dans ‘’le coin le plus sombre de la chambre’’.

Comme on peut le constater, Sidi Mohammed perd son statut de narrateur attitré au profit de Moulay Larbi d’abord, puis de Lalla Aïcha et un peu plus loin de Lalla Zoubida. En effet, ni en sa qualité de narrateur, ni en sa qualité de personnage ne lui permettent d’emprunter le pas à Lalla Aïcha qui est allée à la rencontre de son mari dans l’autre chambre. De là où il est et de la manière dont le mari entretient sa femme (‘’un murmure confus, entrecoupé de silences, bourdonna dans la petite pièce’’), il ne lui était pas possible d’entendre ce que le premier dit à la seconde. Tout ce que nous pouvons savoir c’est que Moulay Larbi doit avoir apporté une mauvaise nouvelle que nous pouvons lire sur le visage de sa femme ‘’Lalla Aïcha vint nous retrouver, le visage bouleversé’’ et ‘’Lalla Aïcha se mit à pleurer silencieusement.’’
Quatrième péripétie : Le soir tombe. Maalem Abdeslam vient chercher sa femme et son fils. Ce passage aurait pu être évité pour des besoins d’économie et d’évidence manifeste. Il constitue une surcharge narrative inutile au déroulement des faits dont l’histoire tourne autour d’une possible mauvaise nouvelle apportée par Moulay Larbi et dont nous ignorons le fond.
Ce n’est que le lendemain vendredi que le narrateur et les lecteurs vont savoir ce que la veille jeudi, Moulay Larbi a dit à sa femme.
Cinquième péripétie : ‘’le lendemain vendredi (page 67)…mais ils ont refusé’’ (page 69)
Lalla Zoubida prend en charge la narration dans ses plus petits détails : Moulay Larbi prend Abdelkader comme ouvrier dans son atelier, le ‘’traite avec bienveillance’’, mais celui-ci va se montrer ingrat en niant avoir emprunté la somme de 80 rials que Moulay Larbi lui a prêtée pour la dot et en prétendant avoir ‘’versé la moitié du capital dans l’achat du matériel, du cuir et du fil d’or.’’
D-Force équilibrante :’’Seuls les experts de la corporation’’ (page 69)…’’ils ont discuté jusqu’au soir’’ (page 70)
Une troisième force entre en action pour un éventuel retour à l’équilibre narratif. D’un côté, un conflit engendré par la dispute de Moulay Larbi et Abdelkader et de l’autre une tentative de remédiation à cet état. Après la tourmente de l’action annoncée par l’élément perturbateur de la force transformatrice, vient l’accalmie générée par le jugement rendu par les experts de la corporation.
Moulay Larbi porte l’affaire devant le pacha, puis devant le prévôt des marchands, puis devant les experts de la corporation mais comme il n’a ni témoins ni reconnaissance de dette, ceux-ci vont ‘’ se prononcer en faveur de Abdelkader’’.

E-Situation finale : ‘’ Finalement…(page 70)… ’’ Un silence suivit cette conclusion’’ (page 70)

C’est là que la triste histoire de Moulay Larbi prend fin.

Conclusion. Nous avons dans cette forme de narration une histoire et plusieurs récits entreposés en marches d’escalier. Tout d’abord, nous avons le récit porteur, celui du narrateur attitré, dans lequel se trouvent imbriqués en paliers le récit de Moulay Larbi à Lalla Aïcha, de Lalla Aïcha à Lalla Zoubida et de Lalla Zoubida à son mari Maalem Abdeslam. Les deux premier récits sont rapportés dans un mode de narration dit récit ( passé simple comme temps de base)et dont ni le narrateur ni le lecteur ne savent son contenu. Le dernier récit est rapporté dans le mode de narration dit discours (ici discours direct de Lalla Zoubida en sa qualité de narratrice de circonstance).

Zaid Tayeb

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