Match Egypte-Algérie : Marocains d’Oujda – Maâkoum ya Dzaïr !
Samedi, les regards des Marocains étaient braqués sur la
confrontation entre Égyptiens et Algériens. Et ils étaient là, ces braves
Marocains, emblème algérien à la main pour supporter nos Verts.
Oujda. Samedi 14 novembre. 15 h 30. Contrairement à ce qu’on imaginait, le
boulevard Mohammed V, Bab Sidi Abdelwahab, Souks Tanger et Melilla grouillaient
de monde. Et dire que le match Maroc-Cameroun allait débuter (16 h). « Ne soyez
pas étonnés, notre mountakhab est déjà out. Tout le monde attend le match
Egypte – Algérie. Et ce n’est pas de l’hypocrisie, nous sommes corps et âme
avec vous. D’ailleurs, vous allez voir tout à l’heure ! », nous informe
Boumediene. Qu’à cela ne tienne, nous le prions quand même d’aller voir leur
match. Au café Colombo, une foule juvénile était amassée devant un écran
plasma. Dès le début de la retransmission à partir de Fès, les langues se
délient : « Vous voyez bien que le stade est vide, je vous le disais… »
Boumediene nous propose d’aller à la place de Sidi Abdelwahab où un écran posé sur
une table réunissait une centaine de personnes. Le but d’Et’o fait disperser la
foule. Subitement, deux jeunes, enfourchant une mobylette, passent, l’emblème
algérien à la main « Maâkoum ya Dzaïr ! » Boumediene précise : « Ce n’est pas
une réaction de dépit parce que le Maroc perd, mais tous se préparent à
supporter les Algériens ». 18 h. Le Boulevard Mohammed V se vide de plus en
plus.
Le café Colombo est bondé. Aucun signe de tristesse après la défaite des
Lions de l’Atlas. Les commentaires sont plutôt humoristiques : « Normal, avec
quatre entraîneurs, ce qui ne s’est jamais vu de par le monde, on aurait perdu
avec quatre buts ; Ainsi, chacun de nos entraîneurs aura mérité d’un but.
Attendons les Rjels d’Algériens ». Et des slogans commencent à fuser dans la
salle à l’apparition des deux équipes au Cairo stadium : « Maâk yal khadra !
Maâk ya Dzaïr ! ». Une personne, la quarantaine, exhibe un drapeau algérien : «
Dieu m’est témoin, si l’Algérie gagne, nous demanderons à Bouteflika de rouvrir
les frontières pour aller soutenir nos frères dans les rues de Maghnia, Tlemcen
et Oran… ». 3ème minute. Amr Zaki marque pour les Pharaons. « Ce n’est pas
normal, ils ont marqué facilement, il y a quelque chose qui ne va pas. Ces
charlatans d’Egyptiens ont dû mettre quelque chose de sorcier pour anesthésier
les Fennecs ». Un autre réplique : « Ecoute ya khouya, ils ont quatre joueurs
blessés, les Algériens ne devraient pas jouer ce match ! Si les Egyptiens
avaient été agressés en Algérie, ils auraient repris le chemin du retour ».
A la mi-temps, des jeunes ayant pris connaissance de notre identité nous
expliquent qu’ils ne comprennent pas le fait que les Algériens n’osent pas trop
en attaque : « Vous avez vu, les Egyptiens sont prenables, c’est quoi cette
tactique, Saïfi est esseulé. Avec cette stratégie, même Ibrahimovich ne
marquerait pas ». Profitant de la pause, nous posons cette question : « C’est
vrai que les Marocains ont confectionné 3 500 drapeaux algériens ? ».
Boumediene, puis relayé par les autres : « C’est vrai, en plus, nos amis
algériens, sur notre demande, nous en ont ramené une quantité appréciable. »
Quand les Halliche et Ziani semblaient prendre le match en main, les supporters
des Verts reprennent leurs chants : « Mazala, mazal, mazal essah ibane ! » Avouons
que nous avions les larmes aux yeux. Une des prouesses de Meghni fait lever
l’assistance : « Regardez le jeu, regardez ces beaux Algériens ! ».
Devant notre angoisse, Boumediene tente de nous rassurer : « La logique
voudrait que vous marquiez, vous êtes les meilleurs ! » Les minutes s’écoulent.
Et quand Saïfi tente le lobe, tous crient : « Il y est ! » Mais, c’était
compter sans le réflexe d’El Hadari. La qualification de notre E.N. est
perceptible. Tous se lèvent et d’une seule voix s’écrient : « Maâk ya Dzaïr,
Maâk yal khadra ! » Mais, lorsqu’à la 96ème minute, les Pharaons corsent
l’addition, les jeunes crient : « Aïe, aïe, aïe… Ce n’est pas juste, hram… »
Nous épargnons les lecteurs des jurons. « Mais, ne soyez pas tristes, malgré
votre prestation, il était écrit que vous ne gagneriez pas. En plus, ils
auraient tué les Algériens se trouvant en Egypte. Il vous reste cependant le
match d’appui au Soudan, et là, il n’y a pas de doute, vous les massacrerez,
footballistiquement parlant ». Tête baissée, les supporters des Verts sortent,
l’air rageur : « C’est la malédiction sur le Maghreb ou quoi ? Déjà que
personne n’imaginait l’élimination de la Tunisie au Mozambique, voilà qu’on est obligé de
reporter notre joie au 18 novembre ! ».
Des jeunes sortis des cafés, le drapeau algérien plié, rentrent chez eux,
désemparés : « Vous serez qualifiés inchallah, je vous le dis ! », nous
encourage le brave Boumediene. 22 heures. L’aire de repos de la frontière, à la
sortie d’Oujda est toujours ouverte. On nous invite pour un dernier thé. Les
commentaires vont bon train : « Si l’Algérie avait gagné, nous serions venus
sur le tracé frontalier avec Akid Lotfi et nous aurions crié Viva l’Algérie,
vive le Maroc. Mais ce n’est que partie remise ! » Là où la politique sépare entre
les deux gouvernements, le football réunit les deux peuples : « Maâk ya le
grand Maghreb ! »
de C. Berriah,envoyé spécial à Oujda (Maroc) – elwatan.com
publié, le 17 Novembre 2009
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