NADOR :L’espace de projets de Driouch-Midar
L’espace de projets de Driouch-Midar
1. Caractéristiques générales
L’espace de projets Driouch-Midar est constitué, sur le plan administratif, des 7 communes de Driouch, Midar, Ben Taïeb, Tafarsit, Ouardana, Azlaf et Tsaft. Il s’étend sur plus d’un millier km2 dont une bonne partie est constituée par la plaine du Kart.
Peuplé actuellement de quelque 100.000 personnes, cet espace enregistre une densité démographique élevée, de l’ordre de 100 habitants au km2.
Les caractéristiques fondamentales de cet espace sont, d’une part, la disponibilité d’une zone de plaine drainée par l’oued Kart et, d’autre part, l’existence d’un petit réseau urbain constitué essentiellement par six centres inégalement importants qui sont Midar, Driouch, Ben Taïeb, Tafarsit, Tlata Azlaf et Cassita, qui jalonnent les axes routiers tout aussi bien dans la plaine que sur ses pourtours montagneux.
La situation de cet espace de projets, disposant de terres agricoles relativement étendues, avec l’existence d’un certain potentiel hydrique, et d’un petit réseau urbain particulièrement actif, fait l’originalité de la plaine du Kart, qui contraste ainsi avec la zone de montagne escarpée et surpeuplée au nord, et les collines prérifaines, arides et peu peuplées au Sud. S’ajoute à cela le caractère beaucoup plus désenclavé de la plaine, traversée par des axes de communication importants qui la relient assez aisément à la conurbation du Grand Nador et à la Basse Moulouya, à l’est, et qui l’ouvrent sur la province de Taza et celle d’Al Hoceimah à l’ouest.
En somme, ce sont ces caractères de plaine étendue potentiellement irrigable, largement ouverte et assez bien desservie par le réseau routier, encadrée par des centres urbains particulièrement dynamiques, qui constituent les atouts essentiels de cet espace et qui devraient favoriser son développement afin d’en faire une aire motrice au sein de la masse montagneuse du Rif Oriental. On ne pourra pas en dire autant des parties relativement plus enclavées de cet espace de projets qui correspondent aux secteurs assez escarpés qui flanquent la plaine du Kart des côtés nord et ouest, mais qui vivent en étroite complémentarité avec elle.
2. Les perspectives démographiques
La population actuelle de cet espace qui est estimée à un peu plus de 100.000 personnes, représente pratiquement le double de l’effectif qui le peuplait au moment de l’indépendance. Toutefois, l’accroissement rapide enregistré au lendemain de celle-ci et jusqu’au début des années 70, avec un taux annuel moyen de plus de 3%, a connu une nette modération par la suite (1.4% entre 1971 et 1982), pour chuter à moins de 0.5% au cours de la dernière période intercensitaire (1982-1994) et tendre vers 0 actuellement. Au total, la population qui comptait près de 54.000 personnes en 1960, s’est élevée à 77.000 environ en 1971, puis à près de 90.000 en 1982 et environ 95.000 en 1994.
En fait, l’accroissement de la population a caractérisé les seuls centres urbains dont l’effectif des habitants a pratiquement triplé entre 1982 et 1994, avec un taux annuel moyen supérieur à 9%.
S’il faut imputer une partie importante de cet accroissement fulgurant à l’extension des périmètres de ces centres, absorbant ainsi plusieurs douars périphériques, il faut également admettre la dynamique démographique évidente de ces centres, se traduisant par un mouvement de construction débordant, mais surtout une immigration d’origine rurale de plus en plus accélérée, venant surtout des communes environnantes.
Comme partout, les taux d’accroissement enregistrés jusqu’ici doivent être modérés pour établir les perspectives démographiques qui restent, somme toute, bien acceptables.
Ces estimations sont établies, bien sûr, en fonction des tendances actuelles, du moins jusqu’à la fin de la présente décennie, pour tenir compte, par la suite, des transformations économiques et sociales qui devront atteindre à la fois le milieu rural et le milieu urbain, sous l’effet de la mondialisation en cours, mais surtout à la lumière de la mise en œuvre des actions volontaires d’aménagement et de développement préconisées par le SDAR.
Perspectives d’évolution démographique
Populations 1982 1994 2000 2005 2010 2015 2020 2025
Midar 3900 11121 14500 17000 19500 22000 24000 26000
Driouch 2587 6884 9000 10500 12000 13500 15500 16500
Ben Taïeb 1203 6246 8000 9500 11000 12500 14000 15000
Tafersit 2299 2575 3000 3500 4500 5500 6500 7500
Cassita – 1359 1500 2000 3000 4000 5000 6000
Tlata d’Azlaf – 1004 1500 2000 2500 3000 4000 5000
TOTAL URBAIN 9989 29189 37500 44500 52500 60500 69000 76000
Population rurale 80132 66177 60000 55000 59000 59000 48000 45000
TOTAL 90121 95366 97500 99500 111500 119500 117000 121000
Taux d’urbanisation % 11,1 30,6 38.5 44,7 47,1 50,6 59,0 62,8
Source : Elaboration Edesa
Quoi qu’il en soit, on devrait tabler sur une population urbaine de l’ordre de 52.000 personnes en 2010 et de près de 76.000 en l’an 2025, si l’on se tient seulement aux six agglomérations précitées (figurant sur le tableau), sachant bien que d’autres noyaux sont en train d’émerger.
Ces petits centres dont la population devra atteindre quelque 5.000 personnes vers 2010 et certainement plus du double vers 2020-25, viendront renforcer et enrichir le réseau urbain local, d’un côté, et porter le taux d’urbanisation de cet espace à plus de 70%, avec près de 85 à 90.000 personnes vivant en milieu urbain, sur une population totale de 120 à 125.000.
Quant à la population rurale, la tendance future ne sera pas différente de celle enregistrée dans les autres zones du Rif, avec une diminution des effectifs, dont une bonne partie ira alimenter les centres urbains locaux, mais également d’autres villes de la Région ou des villes extra-régionales. Les estimations faites à ce sujet donnent une diminution de l’effectif actuel d’un volume de 20.000, pour situer autour de 45.000 en 2025-2030.
Ces projections montrent que la proportion des urbains qui était seulement de l’ordre de 1/10 au début des années 80, et qui est montée à plus de 3/10 en 1994, serait certainement supérieure à 40% actuellement et devrait monter à plus de la moitié vers 2015 et près des deux tiers en 2025.
3. Les actions d’aménagement en milieu urbain
A l’inverse des espaces de projets constituant le Rif Oriental, Grand Nador exclu, seul le territoire de Midar-Driouch bénéficie d’une armature urbaine assez étoffée. Toutefois, l’urbanisation explosive s’est faite, pour l’essentiel, de manière incontrôlée, produisant des espaces urbains très sous-équipés, souvent éclatés et sans véritable base économique susceptible d’en faciliter l’aménagement et y créer de l’emploi.
Les stratégies de développement et d’aménagement de cette zone doivent donc être axées sur l’élaboration et la mise en œuvre de grands projets structurants dans les domaines de l’urbanisme, de l’eau, de l’assainissement et de la production de biens et des services. Il est entendu qu’une telle orientation requiert le déploiement d’efforts importants et la recherche des moyens financiers et humains nécessaires.
3.1. Maîtrise et gestion de l’urbanisation
Jusqu’à présent, l’évolution des centres urbains de la zone s’est effectuée de manière totalement spontanée en raison, d’une part, de l’absence de documents d’urbanisme opérationnels et, d’autre part, sous la pression d’une immigration intense sous-tendue par la prolifération d’activités pour la plupart informelles. Or, les prévisions démographiques indiquent qu’il y aura au moins un doublement de la population urbaine actuelle au cours des trois décennies à venir, avec toutes les conséquences que cela aura sur le tissu urbain, au niveau des structures et des équipements.
L’aménagement urbain de cet espace devrait être conçu de manière globale et intégrée, prenant en compte l’ensemble des composantes de l’espace, et non plus être fragmenté, ni au niveau sectoriel, ni au niveau spatial.
Autrement dit, la stratégie de développement de cet espace porteur, devra mettre en synergie les différents atouts dont il dispose et qui, pour la plupart, sont soit non encore valorisés, soit ont conduit à la production d’effets pervers tout à fait navrants.
Dans cette optique aménagiste, la logique impose d’élaborer d’urgence un Schéma Directeur d’Aménagement de l’ensemble de la plaine, qui intègre l’espace urbain et l’espace rural, en raison de leurs complémentarités, et qui considère la problématique urbaine dans son intégralité. Cela conduit évidemment à mettre sur pieds un SDAU commun à l’ensemble des entités urbaines en présence, afin d’appréhender et de définir les relations inter-urbaines, d’un côté, et les rapports à développer entre villes et campagnes, de l’autre.
De leur côté, les centres émergents de Cassita et de Tlata d’Azlaf, de plus en plus dynamiques et se développant en agglomérations routières sur l’important axe qui lie Nador et la plaine du Kart, d’un côté, à Al Hoceima et Taza, de l’autre, nécessitent également des plans d’aménagement de nature à en structurer le tissu actuel et à en organiser la croissance future. Ceci est beaucoup plus urgent dans le cas de Cassita qui connaît une extension rapide et très désordonnée, en raison de sa localisation au croisement important de la RN 2 et de la RR 565, d’une part, et à cause de son site accidenté, de l’autre.
C’est à partir de ce document de référence, qui devra tracer les options fondamentales du développement de la zone, qu’il sera possible d’élaborer des plans d’aménagement spécifiques à chaque centre, tenant compte de ses mécanismes d’évolution, de ses potentialités propres et des fonctions qu’il devra remplir au sein de l’espace de projets tout en entier.
La croissance urbaine démesurée de ces centres s’est faite et se fait encore en l’absence de plans d’assainissement accompagnant, ce qui pose des problèmes de pollution inquiétants qui portent préjudice non seulement à l’environnement urbain, mais aussi à l’activité agricole et aux ressources hydriques, tant superficielles que souterraines. Il est donc de la plus haute importance d’élaborer, à court terme, un Schéma Directeur d’Assainissement liquide et solide pour les villes du Kart, qui intègre évidemment l’ensemble des centres urbains actuels et des noyaux émergents avec une station de traitement commune, dont les eaux épurées seront fort utiles pour développer l’agriculture irriguée et pour l’arrosage des espaces verts, deux composantes rurales et urbaines qui font ici totalement défaut.
3.2. L’ habitat
La croissance des villes de cet espace de projets est le produit presque exclusif de l’auto-construction qui obéit à ses propres normes sans souci aucun de l’utilisation rationnelle du terrain, ayant conduit à la production de formes d’habitat sans doute en dur, mais parfois érigées sur des sites inconstructibles, voire même dangereux ; le tout ayant conduit à une extension exagérée du tissu urbain, au détriment de l’espace agricole.
Produit dans des conditions improvisées, le tissu urbain souffre partout d’un déficit flagrant au niveau de la voirie et des équipements de base. Aussi, il est nécessaire que les organismes étatiques réalisent, au plus tôt, des opérations de lotissement exemplaires et démonstratifs susceptibles de produire leurs effets auprès des promoteurs privés et des ménages auto-constructeurs, d’autant qu’il existe ici une demande solvable fort importante.
3.3. La question foncière
Comme partout dans les provinces septentrionales du Maroc, la maîtrise de l’aménagement urbain demeure étroitement tributaire de la résolution de l’épineux problème foncier, relatif au régime khalifien. C’est que l’élaboration de documents d’urbanisme, aussi parfaits soient-ils, restera une opération purement technique, sans effets réels, si la ville ne dispose pas de réserves foncières propres, ou ne soit pas capable de maîtriser l’auto-urbanisation dans un cadre réglementaire.
Le problème foncier ne se pose pas dans les villes de cet espace avec autant d’acuité que dans les grandes villes, puisqu’il s’agit de petits organismes urbains et de centres émergents dont les besoins en terrain sont relativement limités et où le prix des terrains reste encore abordable. Cela devra inciter à opérer ici les aménagements fonciers nécessaires pour une bonne maîtrise de la croissance urbaine.
3.4. L’alimentation en eau potable
Se trouvant en position d’abri, et située tout à fait à l’ouest de la zone nord de la Région de l’Oriental, la cuvette du Kart, encadrée par des reliefs pratiquement de toutes parts, souffre d’une aridité bien prononcée.
Ainsi, la rareté des précipitations (200 à 250 mm) pose ici le problème hydrique en termes aigus. Le Kart qui draine la plaine est à écoulement périodique et les nappes souterraines locales ont un degré de salinité élevé.
Or, avec l’accroissement démographique par lequel se caractérisent les centres urbains de la zone qui devront connaître une augmentation très substantielle de leurs populations au cours des deux décennies à venir, les aménagements urbains et les activités économiques nouvelles attendues, sont de nature à générer une demande de plus en plus accrue en eau.
La réponse à ces besoins ne pourra être satisfaite convenablement que par l’adduction des eaux des oueds Moulouya-Za, à partir de Machraa Hammadi, ce qui représenterait une ponction importante à ce niveau ; ou par l’exploration des possibilités d’approvisionnement locales ou dans les zones environnantes. Dans l’une ou l’autre hypothèse, cela nécessitera la mobilisation de moyens financiers consistants.
Sur la base d’une dotation individuelle moyenne par habitant de 100 litres par jour en consommation normale, et de 150 litres par jour en consommation de pointe, les projections effectuées aboutissent aux quantités d’eau potable ci-après :
Projection des besoins en AEP (milliers de m3/an)
pour les centres urbains
Besoins 2000 2005 2010 2015 2020 2025
Moyens 1370 1625 1920 2210 2520 2775
De pointe 2050 2440 2875 3310 3780 4160
Source: Elaboration Edesa
Ainsi, si l’on tient compte des seuls besoins en eau potable pour la population urbaine de centres actuels, la demande est estimée à près de 3 Mm3 /an vers 2025-2030 en débit normal et de 4 à 5 Mm3 en débit de pointe. Or, étant donné la stratégie de développement préconisée par le SDAR, basée sur l’enclenchement d’un processus de production sur le plan économique, la demande globale dépassera certainement ces valeurs, afin de satisfaire les besoins de toute activité industrielle ou touristique nécessaire pour développer ces centres et celle que formulera l’émergence de nouvelles agglomérations.
Les conditions physiques du milieu n’autorisent guère l’établissement d’un barrage de rétention sur le Kart, ce qui oblige à se rabattre sur les ressources locales dispersées, avec une exploitation plus rationnelle des forages actuels et la mise à contribution d’autres ressources. La construction d’un ensemble de petits barrages de retenue sur les cours d’eau qui dévalent les versants montagneux environnants est tout à fait indispensable pour stocker l’eau nécessaire afin de ravitailler en AEP la population de ces centres.
Des efforts sont déjà déployés pour alimenter les centres de cet espace en matière d’eau potable. En effet, des actions sont programmées, dont notamment :
– l’installation d’une conduite d’adduction sur une longueur de 64 km ;
– la réalisation d’une station de pompage ;
– la renouvellement et l’élargissement du réseau de distribution ;
– la construction de 5 réservoirs déjà identifiés.
Le projet d’alimentation actuel en eau potable pour les centres de Driouch, Midar, Ben Taïeb et Tafersite (comprenant aussi le centre de Tiztoutine se trouvant dans l’espace de projets contigu de la Basse Moulouya), permet de subvenir aux besoins de ces centres, du moins à moyen terme. Toutefois, vu la dynamique d’évolution démographique et la mise en œuvre de projets de développement économique et social préconisés par le SDAR, les réalisations actuelles en matière d’AEP s’avèreront insuffisantes plus tôt que prévu, ce qui demande la réalisation d’infrastructures plus performantes et donc une recherche plus importante d’AEP, notamment du côté du Complexe de Moulouya-Za pour le long terme.
3.5. L’assainissement
L’urbanisation spontanée qui a prévalu jusqu’à présent pour la majeure partie du tissu urbain, ne pouvait se soucier de la question de l’assainissement. Or c’est là, l’un des grands points noirs de ces villes naissantes dont les rejets solides et liquides sont directement déversés dans la nature, souvent sans adduction convenable et systématiquement sans aucun traitement.
Compte tenu de la proximité de ces centres, les uns par rapport aux autres (exception faite de Tlata d’Azlaf et de Cassita), il s’avère opportun d’élaborer un schéma général d’assainissement pour les 4 villes du Kart, qui sont Midar, Driouch, Ben Taïeb et Tafarsite ; portant évidemment sur les deux volets de l’assainissement liquide et de l’assainissement solide. C’est également là l’occasion de minimiser les coûts en organisant, pour ces petites villes, un système de traitement commun des eaux usées qu’il est possible de recycler à des fins agricoles, et pour arroser les espaces verts qui font absolument défaut à ces agglomérations. Il en est de même de l’organisation d’une grande décharge commune pour évacuer et traiter les déchets solides.
Des projets d’assainissement sont également requis pour les centres de Tlata d’Azlaf et de Cassita qui ne disposent pas de réseaux en la matière, ce qui se répercute fâcheusement sur l’environnement local, d’autant plus que ces agglomérations éclatées s’accroissent de plus en plus rapidement.
3.6. L’économie urbaine
Jusqu’à présent, les villes du Kart ont connu un certain développement, mais dans la spontanéité et en fonction d’activités tertiaires pour la plupart informelles, dominées par les rentes foncière et immobilière. Dorénavant, une telle évolution ne saurait plus être de mise, en raison du processus de transition de la situation de petits centres vers celle d’organismes urbains de taille relativement importante, d’un côté, et de la nécessité pour chacun d’eux de se forger une base économique solide, afin de se placer sur le marché de l’investissement et offrir des conditions de compétitivité attrayantes, de l’autre. Or, cette compétitivité impose aux villes du Kart de se doter de nouvelles fonctions et, en premier lieu, des activités de production.
Dans les domaines de l’agro-industrie et des matériaux de construction, la zone dispose déjà d’embryons représentés par les briqueteries et la production de chaux et de plâtre. Cette catégorie d’industrie peut être complétée par de petites unités de production de matériel d’irrigation, ainsi que des conduites d’eau, canalisation d’assainissement et de l’eau potable. Le marché potentiel de cette industrie ne se limitera pas aux seules villes de la plaine, mais peut être facilement étendu pour concerner l’ensemble du Rif Oriental qui connaît une petite urbanisation, avec l’émergence d’un nombre de plus en plus important de centres, et même de petites villes, ainsi que le secteur de Tiztoutine proche destiné à connaître un développement important de l’irrigation.
Dans ces conditions, l’aménagement d’une zone industrielle commune s’impose pour l’ensemble des villes du Kart afin de bénéficier des économies d’échelles et de rentabiliser les équipements et les infrastructures nécessaires.
La création de cette zone industrielle commune, dotée des avantages et des services nécessaires à son bon fonctionnement, devrait permettre de regrouper des entreprises actuellement dispersées et de pallier les risques de pollution que cela entraîne pour la plaine et pour les espaces urbains.
La création d’une zone d’activité polyvalente dans chaque centre, permettra de regrouper la plupart des activités de réparation et de production à caractère polluant (pollution hydrique, pollution solide, pollution sonore…), tout en leur offrant les équipements et les services nécessaires pour leur fonctionnement, notamment au niveau de l’accessibilité, de l’approvisionnement en matières premières et de la commercialisation.
Ces zones peuvent rassembler l’artisanat moderne, lié aux deux secteurs importants, celui de la construction (menuisiers, ferronniers, plâtriers, carreleurs…) et du transport (mécanique, chaudronnerie…). En effet, les métiers liés à la construction sont appelés à connaître un accroissement et une diversification de plus en plus importants, parallèlement à la croissance des centres urbains et de leur aménagement, mais aussi aux transformations qui affectent l’habitat rural déjà fortement tourné vers l’utilisation des matériaux modernes.
De même, les activités liées au service de transport sont destinées à connaître un déploiement d’envergure, en raison de la position géographique des villes du Kart. Cette localisation intermédiaire leur permettra de jouer le rôle d’aire de liaison et de carrefour entre les montagnes du Rif Oriental à l’ouest, la conurbation de Nador au nord-est et les périmètres irrigués de la Basse Moulouya à l’est, la zone de Taourirt – Al Aïoune au sud-est, et celle de Taza-Garcif au sud-ouest.
La fonction d’encadrement pour les villes de cet espace, mais aussi pour les espaces de projets contigus de Boudinar-Tamsamane, Dar Kabdani et Aïn Zohra-Hassi Barkane, étant donné leur position médiane entre ces différentes zones, est tout à fait primordiale pour les centres de cet espace de projets.
Afin de bien remplir ces fonctions dans de bonnes conditions et d’épauler la conurbation de Nador – Mlilia dans l’encadrement de tout l’espace sous-régional se trouvant à l’ouest de la Moulouya, il paraît logique de créer là une nouvelle province, comprenant la moitié ouest de l’actuelle province de Nador, avec la promotion de Midar comme chef-lieu, ce qui est de nature à insuffler à la zone une dynamique toute nouvelle.
La mise en œuvre de ces importantes actions d’aménagement et de ces projets de développement, ne peut se concrétiser qu’au moyen de ressources financières substantielles, d’une gestion appropriée et de la disponibilité de cadres compétents, le tout sous-tendu par une réelle volonté de changement. Or, pour l’instant, ces agglomérations demeurent de simples centres intégrés dans les communes rurales auxquelles elles appartiennent, ce qui les prive de toute prérogative pour améliorer leur cadre de vie, consolider leur économie et maîtriser leur croissance.
Aussi, la promotion de ces centres en municipalité leur permettra de devenir des unités urbaines à part entière et de bénéficier, donc, des avantages que procure ce statut en terme de fiscalité, de prise de décision et de moyens de gestion et d’encadrement.
3.7. Les équipements éducatifs et sociaux
· Enseignement et formation professionnelle
Compte tenu de l’évolution démographique et du processus de généralisation de l’enseignement fondamental, tant en milieu urbain qu’en milieu rural, il faut s’attendre à ce que d’importants effectifs d’élèves accèdent à l’enseignement. Sachant que cet espace devra abriter autour de 120.000 âmes à l’horizon 2025, il est important de préparer les structures d’accueil pour des effectifs de plus en plus importants, avec l’équipement didactique approprié et le personnel-enseignant requis. S’il est normal que chaque centre urbain dispose de ses établissements d’enseignement fondamental, il sera judicieux de répartir les différentes formes d’enseignement secondaire entre les centres urbains de la zone dans une logique de complémentarité et de minimisation des coûts et d’optimisation des rendements, avec la spécialisation de chacun dans des types de formations bien arrêtées.
Le même raisonnement devra prévaloir en ce qui concerne l’installation des établissements de formation professionnelle dans la zone, en veillant à doter chaque centre d’un établissement spécialisé de haut niveau desservant l’ensemble de la population locale, quitte à ce que chaque centre dispose de ces établissements de formations de premier et de second niveaux.
· Santé
Devant le grand déficit enregistré actuellement au niveau des équipements de santé, et afin de qualifier la zone dans ce domaine, il est nécessaire de la doter d’un établissement hospitalier qui devra encadrer une population de plus en plus nombreuse, relativement éloignée de Nador qui, malheureusement aussi, se trouve défavorisé en cette matière.
Toujours dans la même logique d’optimisation des dépenses et de rationalisation des services, l’institution hospitalière préconisée devrait être implicitement localisée à Midar, qui est à la fois le centre urbain le plus peuplé, le plus dynamique et qui bénéficie d’une localisation centrale, par rapport aux autres centres urbains de la zone. Si l’on tient compte de l’éventualité d’une future province de Midar, cet hôpital devra grouper les différents services médicaux du niveau d’une capitale provinciale. Il va sans dire que des équipements de santé « banals » doivent bénéficier à chaque centre urbain actuel ou émergent, afin de rapprocher au mieux le service de la population locale.
4. Les actions d’aménagement En milieu rural
4.1. L’agriculture
L’aridité accentuée du milieu impose l’irrigation pour toute culture rentable. L’intensification de celle-ci suppose de ce fait la mobilisation de ressources hydriques suffisantes, afin de valoriser une plaine qui, à l’instar de celles de Tiztoutine, qui la jouxte à l’est, pourrait devenir un périmètre irrigué important dans l’Oriental.
Les nappes du Kart moyen et d’Azlaf recèlent un volume d’eau important et pourraient être mises à contribution pour le développement de l’agriculture, moyennant des aménagements fonciers et des équipements hydrauliques appropriés.
Il en va de même de la nécessité de construire des ouvrages de rétention sur les cours d’eau bordiers de la plaine afin de pouvoir organiser de petits périmètres locaux. De telles opérations auront pour objectif également de fournir de l’eau potable et de dompter les torrents qui occasionnent parfois des inondations catastrophiques.
Par ailleurs, la politique hydraulique dans la Basse Moulouya devra réaliser une économie substantielle de l’eau d’irrigation, que ce soit dans la plaine des Trifa ou celles de la rive gauche de la Moulouya, ce qui serait de nature à dégager un volume d’eau consistant pouvant être affecté aux besoins d’irrigation de la plaine du Kart. Une autre ressource d’eau d’irrigation à partir du traitement et du recyclage des eaux usées des villes pourrait contribuer à satisfaire certains besoins.
De tels aménagements entraîneraient l’émergence d’un secteur agricole moderne, à l’image des périmètres de la Basse Moulouya, avec le développement de l’arboriculture et du maraîchage dont la production viendra appuyer l’existant, à la fois pour approvisionner les villes et dégager un surplus pour l’industrie alimentaire et l’exportation.
Cette évolution agricole concernera également le secteur de l’élevage qui connaîtra, ainsi, un développement parallèle et offrira des possibilités d’augmentation de la production bouchère et laitière et de produits dérivés.
Le succès d’une telle entreprise, qui du reste est non seulement nécessaire mais aussi bien possible, est largement conditionné par une action d’envergure au niveau du foncier et de l’organisation des agriculteurs. Sachant que la question du statut khalifien des terres ne trouvera pas sa solution de sitôt et que l’opération d’immatriculation durera longtemps, on pourrait dépasser cette situation de blocage, en créant un ensemble de coopératives ou de société d’investissement et d’exploitation agricole, qui enclencheraient la dynamique de valorisation souhaitée.
Ceci en ce qui concerne les zones de plaines irrigables ; ailleurs, en zone bour, deux types d’opérations s’imposent :
d’un côté, l’aménagement des parcours pour appuyer l’élevage extensif assez important dans la zone, mais aussi des travaux de valorisation des terres (épierrage, défonçage…) pour aider les petits agriculteurs;
d’un autre côté, il est nécessaire de concevoir et de mettre en œuvre un large programme de reboisement, en bonne partie constitué par des arbres fruitiers (olivier, amandier), pour améliorer les revenus des ménages et fournir de la matière première aux unités oléicoles. Les reboisements permettront, bien entendu, d’atténuer l’érosion et de favoriser la reconstitution des ressources hydriques.
Pour appuyer ces importants projets hydro-agricoles et fonciers et leur garantir le succès souhaité, il est évidemment indispensable de doter le monde rural d’équipements socio-éducatifs de base avec une infrastructure de transport fonctionnelle à même de répondre aux objectifs du SDAR.
4.2. L’alimentation en eau potable
Actuellement, on note la programmation d’un projet d’alimentation en eau potable concernant une quarantaine de douars dans la commune de Midar. Ces travaux portent sur les opérations suivantes :
Installation de canaux d’adduction sur une longueur de 100 km ;
Réalisation de 50 bornes-fontaines ;
Construction et équipement de 2 réservoirs avec une capacité de 50 m3, de 3 autres ayant une capacité de 100 m3 et d’un autre avec une capacité de 200 m3.
Il est évident que de tels projets doivent être généralisés à l’ensemble de l’espace rural afin de contrer une déprise démographique exagérée dans les secteurs les plus vulnérables.
4.3. L’éducation et la formation professionnelle
Les changements projetés pour cet espace de projets en milieu rural ne peuvent se réaliser valablement en l’absence de ressources humaines formées et encadrées en conséquence. Aussi faut-il doter les agglomérations rurales des établissements d’enseignement fondamental et de formation professionnelle, afin de favoriser la fixation des jeunes dans les campagnes et, du coup, alléger la pression migratoire sur les centres urbains de la zone. A cet effet, les actions suivantes doivent être menées :
une action continue d’alphabétisation dans les douars, en particulier auprès des femmes et des jeunes filles non scolarisées, fort nombreuses ;
la sensibilisation et l’encouragement de la scolarisation par :
+ l’équipement et l’encadrement des écoles rurales ;
+ la distribution de fournitures scolaires ;
+ la construction de salles de cours dans les douars enclavés et très
éloignés ;
+ l’amélioration de l’infrastructure de communication et de transport
pour désenclaver le maximum d’agglomérations rurales.
4.4. Les équipements de santé
En dépit de l’accessibilité relativement facile d’une grande partie de la zone, située en terroir de plaine, plusieurs agglomérations rurales relativement isolées sur les contreforts du Rif ont besoin d’établissements de santé et de planification familiale pour assurer des prestations de proximité, réclamées par la population (essentiellement les centres de santé avec unité d’accouchement et de planification familiale).
Dans ce domaine, il y a lieu de prendre en considération qu’il s’agit là de populations ayant des exigences assez élevées en matière de santé, générées par une longue tradition migratoire en Europe et que maintient le contact étroit avec les MRE.
4.5. Les infrastructures routières
L’évolution qu’entraîneront ces actions volontaires dans les domaines de l’agriculture et de l’urbanisation, requiert l’amélioration du réseau routier, notamment en dehors des routes nationales n°2 et n°15 qui encadrent la plaine. On insistera ici sur la route de Driouch-Aïn Zohra qui devra être élargie et aménagée ; alors que la piste qui joint cette dernière localité à Midar est à refaire et à goudronner pour désenclaver cette partie ouest de l’espace de projets.
Conclusion
Dans le Rif Oriental, l’espace de Driouch-Midar fait figure d’une aire relativement favorisée par la nature puisqu’il s’agit en bonne partie d’une vaste plaine dont les potentialités virtuelles sont loin d’être négligeables. Si la question hydrique nécessite des aménagements et des équipements d’envergure et si la question foncière appelle une volonté ferme pour la résoudre, la zone du Kart dispose d’ores et déjà, et de manière immédiate, de l’atout financier qui fait souvent défaut ailleurs. En effet, Ben Taïeb, Driouch mais surtout Midar, encore petites localités urbaines certes, figurent parmi les places bancaires les plus importantes de la Région. Midar figure même dans le peloton de tête des «places financières du Maroc», lorsqu’on considère la masse des dépôts bancaires qui y sont effectués.
Ces importantes disponibilités financières qui émanent des activités parallèles, du commerce et surtout de l’émigration, ne trouvent pas le terrain favorable poufavorable pour être investies dans les activités de production. Elles sont en partie mises dans la construction et parfois investies dans de petits projets agricoles ou commerciaux, alors que le gros de la masse monétaire est véhiculé ailleurs, tout aussi bien par les banques que par les épargnants eux-mêmes.
Dans ces conditions, il est impératif de mettre en place des mécanismes de mobilisation de ces avoirs pour en investir une large partie sur place et en faire profiter cet espace de projets, aux potentialités certaines, mais pour la plupart encore en friche. Une structure locale de mobilisation des fonds financiers pourrait constituer la clé de voûte du processus d’investissement et de développement économique de cet espace. Sa création et son fonctionnement devront intervenir en liaison avec le Centre Régional d’Investissement (CRI) et la Banque Régionale de Développement (BDO) préconisée par le SDAR.
Ce n’est que par le lancement immédiat de ces différents chantiers d’aménagement et de développement économique et social, que l’on pourra générer des emplois en nombre suffisant, afin de résorber un chômage actuellement envahissant et qui risquerait de s’aggraver si l’on ajournait la mise en œuvre des projets souhaités.
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