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NADOR :L’espace de projets de BOUDINAR-TAMSAMANE

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L’espace de projets de BOUDINAR-TAMSAMANE

Sur le plan administratif, cet espace de projets se compose de huit communes rurales, dont trois donnant sur le littoral méditerranéen, à savoir d’Est en Ouest, Bni Marghnine, Boudinar et Oulad Amghar limitée par l’oued Nakkor ; les cinq autres se situent vers l’intérieur des hauteurs rifaines, comprenant Tamsamane, Talilit, Ifarni au Sud-Est, Ijarmaous et  Trougout, au Sud-Ouest, contiguës à la province d’Al Hoceimah.

Sur le plan physique, c’est un massif montagneux compact profondément disséqué par de multiples oueds, descendant directement vers la Méditerranée, ou s’écoulant vers la plaine du Kart ou vers le Nakkor. De structure plissée ou charriée, le matériau géologique a subi diverses formes d’érosion, qui entraînent parfois des formes de badlands incultivables.

Le climat méditerranéen, très contrasté, alterne une saison estivale sèche et particulièrement chaude, et une saison froide marquée par d’assez importantes chutes de pluie, parfois même de neige.

L’espace de Boudinar-Tamsamane est essentiellement rural, avec de rares agglomérations à caractère pré-urbain. Ici, l’enclavement est bien marqué en raison de la médiocrité du réseau de communication. Cet espace présente des potentialités et des atouts nettement moins saillants que les espaces mitoyens, et ses chances de développement nécessitent des efforts importants pour leur valorisation..

1. Des problèmes d’aménagement et de développement aigus

Les problèmes les plus handicapants pour le développement et l’aménagement de l’espace de Boudinar-Tamsamane peuvent être sommairement résumés dans l’enclavement du territoire, la forte dégradation du milieu naturel, la rareté de l’urbanisation et de l’eau potable ; enfin la forte dépendance vis-à-vis des ressoources extérieures.

L’enclavement est presque partout très prononcé, puisque ce massif compact, fortement entaillé par l’érosion, n’est traversé que par de rares voies de communication dont notamment la régionale 610 qui serpente les hauteurs pour joindre Nador à Al Hoceimah. Seule la petite route qui descend vers la plaine du Kart constitue une voie interne au massif. Le reste de la montagne souffre d’un grand déficit d’accessibilité, fort préjudiciable à son développement.

Si le problème de l’enclavement va s’atténuer sensiblement pour les communes littorales, traversées déjà par la route régionale 610, et qui vont bénéficier du passage de la rocade méditerranéenne, il en va autrement des communes intérieures qui sont simplement contournées par les voies de communication, ce qui pourrait accentuer même plus leur  marginalisation.

La dégradation du milieu naturel, qui se manifeste par une intense érosion du sol et un appauvrissement continu du couvert végétal. Cela est principalement dû à une très forte pression humaine sur l’espace, en quête de terres de culture et de parcours. Souvent dénudés, les sols se dégradent davantage sous l’effet de l’aridification du climat et du caractère des précipitations, d’autant plus qu’ils ont des structures très instables. La vulnérabilité extrême de l’écosystème impose des actions d’envergure bien appropriées, destinées à protéger et à réhabiliter une nature fortement meurtrie.

Cette pression démographique ancienne, de la part de populations sédentaires séculaires, est d’autant plus problématique que les potentialités des milieux sont limitées, et que les besoins des résidents ne cessent d’augmenter et de se diversifier.

S’agissant de la question de l’eau, il faut noter, là aussi, la disponibilité relative de cet élément vital dans la nature, alors qu’il y a une insuffisance notoire de sa mobilisation pour les besoins d’irrigation et d’alimentation en eau potable.

Le déficit urbain de cet espace de projets constitue actuellement un handicap majeur pour enclencher son développement. Comparé à la plaine du Kart et à la zone d’Al Hoceimah qui bénéficient de l’existence de centres urbains relativement nombreux et étoffés, l’espace de Boudinar-Tamsamane n’a que peu d’agglomérations à caractère urbain susceptibles d’émerger à court terme, pouvant jouer le rôle de pôles de développement local.

La forte dépendance par rapport à l’argent de l’émigration extérieure, en raison de la médiocrité de la production agricole et des revenus locaux, comparés à une densité démographique élevée, de l’ordre de 100 habitants au km2 en moyenne. Cette situation se reflète clairement lorsqu’on considère divers critères sociaux et culturels (bas niveaux de scolarisation, d’alphabétisation…) ainsi que la nature des équipements disponibles, tout à fait dérisoires.

2. Perspectives démographiques

La population de cet espace de projets est actuellement estimée à 75.000 personnes, ce qui représente un accroissement de l’ordre de 2/5 par rapport à l’effectif de 1960. En fait, le volume de population semble avoir atteint sa limite au début des années 80, avec un effectif de plus de 81.000 personnes environ, pour entamer un mouvement de diminution de plus en plus sensible.

Cette réduction est beaucoup plus tangible dans les communes rurales de l’intérieur, nettement plus enclavées, par opposition aux communes littorales, mieux desservies par les voies de communication et donc plus ouvertes sur Al Hoceimah, Nador et la plaine du Kart, dont la population a même relativement augmenté de quelque 5% entre 1982 et 1994.

De façon générale, cette stagnation ou diminution de la population, sont imputables essentiellement à l’émigration interne et vers l’étranger. En effet, comme dans l’ensemble de la montagne rifaine, l’émigration des populations rurales vers les villes marocaines et vers l’Europe permet l’allégement de la charge démographique de campagnes anciennement et exagérément peuplées, eu égard à leurs potentialités naturelles et productives limitées.

Aussi, il est prévisible que la population de cet espace de projets connaisse une stagnation de son effectif au cours de la décennie actuelle, pour entamer un léger redressement par la suite. Partout il y aura une nette tendance à l’urbanisation, mais avec une dynamique différente entre le secteur littoral et sublittoral  promis à un développement déjà bien sensible avec une nette tendance à l’urbanisation, d’un côté, et une dynamique différente entre le secteur littoral et sublittoral promis à un développement déjà bien sensible, et les communes intérieures isolées et donc peu intégrées à leur environnement régional, du fait de l’absence de voies de communication, de l’autre.

Perspectives démographiques (2000-2025)

 
Milieu    2000    2005    2010    2015    2020    2025      
Population rurale    64.000    62.000    58.000    55.000    50.000    45.000      
Population urbaine *    11.000    13.000    18.000    23.000    32.000    40.000      
Population totale    75.000    75.000    76.000    78.000    82.000    85.000      
Taux d’urbanisation (%)    15    17    24    29    39    47     
* Centres émergents             Source : Elaboration Edesa

La baisse de la population rurale est une tendance constatée depuis le début des années 80. Elle se prolongera, selon toute vraisemblance au cours des décennies à venir, comme réponse à la diminution prévisible du volume des transferts monétaires de l’émigration, et comme processus normal de la baisse des surdensités démographiques que supporte actuellement le monde rural.

Toutefois, le mouvement de diminution devra sans doute s’atténuer à partir de la prochaine décennie, en réponse aux effets attendus qu’entraîneront les améliorations des conditions de vie des populations, suite à la mise en œuvre des projets préconisés par le SDAR en matière d’équipements de base et d’infrastructures, tout particulièrement d’alimentation en eau potable, d’assainissement, de voies de communication, d’enseignement, de santé et d’emploi.

Estimée actuellement à quelque 75.000 âmes, la population de l’espace de Boudinar-Tamsamane devra tendre vers 85.000 environ d’ici un quart de siècle. Quant à la population rurale qui constitue actuellement l’essentiel de l’effectif, elle se maintiendrait autour de 45.000 à 50.000 habitants à l’horizon 2025-2030.

Parallèlement, se renforcera le mouvement d’urbanisation avec l’accroissement des petits centres actuels et l’apparition d’autres, le tout abritant près de 18.000 personnes en 2010 et quelque 40.000, quinze années plus tard.

Les plus importants de ces centres émergents autour desquels s’articulera l’espace sont Boudinar, Corona, Ajdir, Laazib, Ifarni, Taliouine, Oulad Amghar, en plus des chefs-lieux des communes appelés à connaître un développement plus ou moins soutenu.

3. Stratégie d’aménagement et projets de développement

L’espace de projets de Boudinar-Tamsamane appelle le déploiement d’importants efforts en vue de son intégration dans l’ensemble provincial et régional. Ses potentialités, certes limitées, ne sont pas négligeables. Leur mise en valeur requiert la réalisation d’un programme d’équipement intégré dans tous les domaines de la vie sociale, économique et culturelle et la consolidation du phénomène urbain afin d’articuler le développement local sur des noyaux convenablement équipés, capables d’encadrer un espace et une population en grande partie ruraux, handicapés par la fragilité du milieu naturel et par un enclavement accusé.

3.1. Etoffement du réseau routier

Cet objectif essentiel ne pourra être réellement atteint que par deux types d’actions complémentaires : l’amélioration des routes existantes, d’un côté, et l’ouverture de nouvelles pour faciliter l’accès à de larges pans de cette zone montagneuse, tantôt inaccessible, tantôt ne disposant que de pistes médiocres, souvent coupées à la circulation, de l’autre.

La première catégorie d’actions consiste à procéder à :

L’élargissement de la route régionale 610 qui constitue l’axe principal qui traverse le secteur de Boudinar-Tamsamane, depuis Nador jusqu’à Imzourene sur la rive gauche du Nakkor ;
Le renforcement des routes méridionales qui joignent la Nationale 2 à la route régionale 610, et plus tard, à la rocade méditerranéenne tant attendue ;
Le désenclavement de la partie occidentale de cet espace qui constitue pratiquement un monde presque fermé, contourné par les voies de communication et faisant des communes d’Ijarmaous et de Trougout des môles  difficilement pénétrables ;
La construction du tronçon occidental de la Route Méditerranéenne, relevant de la province de Nador, ce qui aurait un impact fort important sur la partie littorale de cet espace, de manière directe, et sur l’ensemble des communes internes, de manière indirecte.

La seconde catégorie d’actions concerne la construction de routes internes afin de permettre la pénétration du massif montagneux et relier les agglomérations actuellement isolées au monde extérieur.

L’ensemble de ces agglomérations destinées à améliorer l’accessibilité de l’espace rural et des agglomérations de population qu’il abrite est une condition incontournable pour promouvoir l’économie rurale, permettre aux populations d’accéder aux services sociaux nécessaires, ainsi qu’aux émigrés de pouvoir atteindre leurs douars d’origine et donc d’y réaliser des conditions de résidence convenables et des investissements productifs souhaités, que ce soit dans l’agriculture ou des activités de service faisant actuellement grand défaut dans cet espace montagneux.

3.2. L’alimentation en eau potable

Etant donné le caractère montagneux, au relief très chahuté, et du climat globalement aride et fort contrasté, la zone ne dispose pas d’importantes ressources hydriques. Toutefois, elle n’est pas dépourvue d’atouts à ce niveau puisqu’elle compte plusieurs cours d’eau, charriant parfois des débits substantiels en saison pluvieuse, notamment l’Oued Ameqrane, d’une part, et qu’on y a reconnu des nappes souterraines au potentiel non négligeable, d’autre part.

En conséquence, il y a lieu :

d’élaborer un vaste programme d’identification des sites favorables à la construction d’ouvrages pour retenir les eaux de ruissellement véhiculées par les nombreux oueds dont l’écoulement se perd souvent en mer, ou bien dévale vers le Nakkor et le Kart. Une étude spécifique est nécessaire à cet égard pour procéder à l’analyse des sites et leurs caractéristiques physiques quant à l’établissement d’ouvrages de rétention d’eau, d’autant plus qu’il s’agit de plus en plus, d’une structure géologique fort complexe avec une évolution morphologique particulière.

d’édifier de petits barrages sur ces cours d’eau, revêt une importance capitale à la fois pour fournir l’eau potable et constituer des réserves pour l’irrigation ; le potentiel le plus intéressant à cet égard est constitué par l’Oued Ameqrane ;

d’entamer des actions de recherche et d’évaluation des ressources souterraines en vue de réaliser les forages nécessaires pour alimenter les agglomérations urbaines et rurales en eau potable.

Parallèlement, ces agglomérations et notamment les centres urbains émergents nécessitent des travaux d’adduction d’eau pour sous-tendre leur croissance et encourager leur développement économique. A cet égard, le programme PAGER devra être davantage renforcé dans la perspective de fournir de l’eau, non pas seulement à des douars, mais à de petits centres urbains animés par un mouvement de construction de plus en plus intense.

3.3. L’organisation des réseaux d’assainissement

Le corollaire indispensable de l’amélioration en eau potable des petits centres urbains qui sont en train de se multiplier et de s’étoffer est, évidemment, l’organisation de réseaux d’assainissement performants pour ne point hypothéquer le développement de ces centres à la fois en ce qui concerne la propreté de leur environnement, leur alimentation en eau potable, tout en évitant la pollution des nappes et des retenues d’eau, et de préserver la qualité des eaux d’irrigation.

3.4. La consolidation du phénomène urbain

L’urbanisation de cet espace de projets constitue en soi une importante option du SDAR qui y voit une condition de base pour permettre à cet espace de bénéficier d’un encadrement satisfaisant, d’équipements socio-éducatifs appropriés et d’une ouverture sur les espaces contigus compris dans la Région de l’Oriental ou dans les régions voisines (Al Hoceimah et Taza).

C’est dans cette optique qu’il est absolument nécessaire de promouvoir la plupart des centres émergents actuels en municipalités, afin de leur permettre d’accéder aux avantages que permet ce statut administratif bien privilégié par rapport à celui de simple agglomération rurale sans ressources et sans prérogatives. Il s’agit en priorité des centres de Boudinar, Corona (centre qu’il s’agit d’ailleurs de rebaptiser en lui donnant un nom patrimonial convenable à la place de cette dénomination coloniale tenace), Ajdir et Amzaourou, dans la commune de Tamsamane, de Laâzib et Oulad Amghar dans la commune de même nom, Ifarni ainsi que les chefs-lieux des autres communes de cet espace.

Parallèlement à cette promotion d’ordre administratif de portée déterminante, il est indispensable de doter l’ensemble de ces centres de plans d’aménagement, dans les plus brefs délais, pour en maîtriser la croissance et leur permettre de  remplir leurs fonctions de foyers de développement de la zone et de points de liaison avec les espaces environnants.

Pour ce faire, il est urgent d’éclaircir et d’assainir la situation foncière et d’envisager le développement de lotissements d’urbanisme. L’apurement du foncier est évidemment de nature à encourager les établissements publics et le secteur privé à réaliser des programmes de lotissements destinés à satisfaire une demande potentielle appréciable de la part de ménages ayant un niveau de solvabilité non négligeable et, partant, renforcer les noyaux urbains en herbe.

4. Les secteurs sociaux et culturels

Compte tenu de l’enclavement très prononcé de cet espace de projets et des retards accumulés dans le domaine socioculturel, il est nécessaire d’y renforcer et souvent d’y créer, ex-nihilo, les équipements socio-éducatifs et collectifs nécessaires pour l’encadrement de la population et lui fournir les services adéquats.

4.1. L’enseignement et la formation

La carte scolaire de cet espace devra être révisée dans le sens de doter les localités urbaines émergentes d’établissements scolaires (écoles, collèges, lycées). Ces centres devront également être dotés, au plus tôt, d’établissements de formation professionnelle, pour les niveaux « spécialisation », « qualification », « technicien » et « technicien spécialisé ».

C’est dans ce sens qu’il faudra consolider l’équipement d’enseignement et de formation dans les centres les plus actifs, notamment Boudinar, Corona et Ifarni afin de retenir les élèves et les jeunes sur place, et d’éviter ainsi l’accentuation de la  déprise démographique qui sévit actuellement dans ces montagnes.

Ainsi, la carte de la formation professionnelle devra prévoir la construction de centres de formation aux différents niveaux pour permettre aux ressources humaines endogènes de la zone de bénéficier des profils nécessaires pour s’intégrer dans les circuits de production et de commercialisation et prendre part activement au développement de leur espace, ce qui devrait modérer le mouvement d’émigration des jeunes.

4.2. Sports, loisirs et culture

Les jeunes ont une forte tendance à vouloir émigrer en dehors de cette zone de façon précoce, en raison du chômage, mais aussi par manque de moyens de divertissement et de culture, d’autant plus que l’émigration est ici une vieille tradition grandement tentante et que l’image de la vie en Europe y est largement véhiculée tout aussi bien par les MRE et leurs enfants lors des congés annuels, que par les chaînes de télévision étrangères bien présentes dans les foyers.

Pour mettre fin à cet enclavement intellectuel, il est proposé d’élaborer un programme visant à construire des maisons de jeunes équipées d’installations sportives, de bibliothèques disposant des moyens de communications et d’informations modernes. Dans ce sens, le Département de la Jeunesse et des Sports est appelé à doter les agglomérations en croissance, d’équipements nécessaires pour faciliter la transition de la jeunesse vers les modes de communication et de culture requis par la modernité.

4.3. La santé

L’infrastructure sanitaire y est ici des plus rudimentaires. Or, il est prioritaire dans ce sens de faciliter l’accès des populations aux services de santé. Il est indispensable d’étendre en milieu rural le programme des priorités sociales, pour améliorer la couverture médicale et renforcer les activités liées à la planification familiale et à la lutte contre les maladies.

Par ailleurs, l’importance de l’émigration à l’étranger procure aux populations locales non seulement des transferts monétaires fort appréciables, mais également un référentiel sanitaire et des normes médicales relativement élevées, puisque l’étalon de comparaison est ici l’Europe.

De la sorte, et afin de combler les énormes retards et de mettre à niveau ces espaces montagneux sur le plan sanitaire, il est indispensable de les doter, et au plus tôt, des infrastructures suivantes :

un hôpital sous-régional de bon niveau à Boudinar,
des centres de santé dotés d’unités d’accouchement, dans les centres émergents,
des salles de soins dans les agglomérations difficilement accessibles.

5. La diversification de l’économie locale

Pour l’instant, la promotion de l’économie de ces montagnes est entravée par plusieurs facteurs défavorables dont notamment la situation foncière complexe, l’enclavement accusé de la majeure partie du territoire, l’émigration des jeunes et des compétences, parallèlement à l’importance relative des revenus procurés par les transferts des MRE qui mettent une bonne partie de la population en situation de dépendance aiguë.

Or, les potentialités productives de cet espace ne sont guère négligeables, d’autant plus que les populations sont entreprenantes et que les ressources financières mobilisables peuvent s’avérer substantielles. Toutefois, il faut souligner que le développement économique de la zone reste fortement tributaire des actions d’aménagement exposées plus haut, relatives à l’amélioration de l’accessibilité du milieu, à la consolidation de l’armature urbaine et des équipements socio-collectifs des différents centres, ainsi qu’aux actions destinées à mobiliser de manière optimale les ressources en eau et de protéger l’environnement.

Trois grands secteurs sont susceptibles de connaître ainsi un développement appréciable : l’agriculture, la petite industrie et l’artisanat, avec le tourisme, qui doivent ainsi bénéficier d’une attention particulière.

·     L’agriculture

Le développement de ce secteur dépend largement de la résolution de la question foncière dans le sens de l’extension de l’immatriculation et du cadastre, du moins dans les zones à potentialité agricole concrète. Ceci permettra  de débloquer une situation pour l’instant globalement gelée, afin de verser l’assiette foncière dans le marché normal, favorisant du coup la restructuration de la propriété et la constitution d’exploitations viables susceptibles de mobiliser l’investissement. Ce dernier est potentiellement disponible, généré par les activités commerciales et par les transferts des MRE. Mais, en l’absence de pouvoir être fructifié dans la production agro-pastorale, il est souvent consumé dans la construction de maisons familiales, parfois cossues, et largement dépensé dans la consommation quotidienne banale.

Si l’ouverture du foncier est une condition de base pour la promotion de l’agriculture, celle-ci ne pourra être réellement rentable que si des actions d’aménagement fondamentales sont entreprises, parmi lesquelles on insistera ici sur les suivantes :

la mobilisation des ressources hydriques pour organiser de petits périmètres irrigués, seul moyen d’intensifier le système de production, généralement extensif pour l’instant, en raison de l’aridité structurelle et de l’irrégularité des précipitations. Ces ressources en eau, parfois abondantes en saison pluvieuse, nécessitent, comme nous l’avons déjà souligné, le lancement d’un programme de construction d’ouvrages de retenue sur les cours d’eau les plus importants avec un système de drainage de l’écoulement qui se fait dans les affluents et les ravins.

La protection des sols. Etant donné le caractère accidenté du relief montagneux, les ouvrages de maîtrise de l’eau auront aussi l’avantage de modérer sensiblement les processus d’érosion qui dégradent les sols, ainsi que les cas d’inondation qui se produisent dans les vallées importantes. C’est justement dans ces dernières qu’il faudra rechercher à protéger le patrimoine pédologique et à organiser des secteurs de PMH.

En effet, le développement du secteur agricole au moyen de l’irrigation répond à la nécessité d’augmenter et de diversifier la production afin de satisfaire la demande de plus en plus importante en produits maraîchers, laitiers et fruitiers, qui sera progressivement formulée par des centres urbains en développement, avec une population sans cesse plus exigeante.

La réalisation d’aménagements hydro-agricoles dans les sites les plus favorables à l’irrigation, c’est-à-dire les vallées et les bassins intérieurs en aval des ouvrages de retenues d’eau, ou à la faveur de l’exploitation de nappes  phréatiques relativement fournies. Il est nécessaire de souligner que l’organisation de ces petits périmètres devra se faire, autant que possible, dans le sens de l’encouragement des techniques d’irrigation localisées pour réaliser le maximum d’économie d’eau dans une zone où cette denrée est relativement limitée. Il faut souligner que les exploitants locaux sont tout à fait conscients de cette nécessité et sont, donc, prêts à soutenir une telle modernisation.

L’encadrement des agriculteurs, pour opérer cette conversion de l’agriculture vers l’intensification et la diversification de la production, est une condition d’accompagnement indispensable. A ce titre, il est souhaitable d’encourager les coopératives de service et de commercialisation de produits, parallèlement à des actions de vulgarisation.

Le fait que nous avons là à faire à de vieilles communautés agricoles sédentaires, constitue un facteur potentiellement favorable pour le développement de l’agriculture et de l’élevage dans cette partie du Rif Oriental.

La protection du milieu. La fragilité des matériaux géologiques et l’instabilité des sols, d’un côté, l’aridité et les contrastes pluviométriques, de l’autre, exposent le couvert végétal à une dégradation continue, celle-ci étant aggravée par des opérations de défrichement incontrôlées et des actes de déforestation insidieuse. Il faut avouer que la situation héritée de la période coloniale a été franchement critique en raison des agressions profondes que le colonisateur n’a pas cessé de porter à la forêt locale (tout comme partout dans les montagnes du Rif), situation qui a été exacerbée par la pression démographique au cours des cinq dernières décennies et le laisser-faire généralement de mise dans ce domaine.

En conséquence, il est impératif de lancer un vaste programme de reboisement et de reforestation dans ces montagnes afin de reconstituer un couvert végétal actuellement en lambeaux, ce qui permettra de modérer les processus d’érosion, de protéger les sols, de régulariser l’écoulement et d’augmenter ainsi à la fois la biomasse pour le cheptel et les réserves hydriques pour l’agriculture. Il va sans dire que cette entreprise de reboisement pourra changer profondément l’environnement et constituer une base essentielle pour l’écotourisme, sans parler des innombrables opportunités d’emploi que généreront ces chantiers de reforestation. Cette entreprise de grande haleine suppose un très haut taux d’éveil et de responsabilité de la part de tous les acteurs.

·     Le tourisme

La réhabilitation de l’environnement, l’amélioration de l’adduction d’eau et des conditions d’assainissement sont de nature à permettre à l’activité touristique de se développer dans cette zone de montagne escarpée. Cela requiert aussi l’aménagement de pistes pour voitures tous terrains, ainsi que de sentiers de randonnées, jalonnées les unes et les autres par des gîtes aptes à accueillir les touristes. Les quelques massifs forestiers restants, notamment celui de Jbel Al Garn surplombant les localités de Boudinar et de Corona vers l’Est, de Trougout et d’Ajdir à l’Ouest et la méditerranée du côté nord, renferment un peu de gibier qui anime une certaine activité de chasse. Celle-ci peut être beaucoup plus développée dans le cadre des programmes de reboisement préconisés avec reconstitution de la faune.

L’activité touristique devra bénéficier, en plus des atouts que renferment les montagnes intérieures, des actions d’aménagement qui profiteront aux zones littorales, à la faveur du percement de la route méditerranéenne côtière. La réalisation de cette voie routière aura pour avantage l’ouverture de la zone à la fois sur la conurbation de Nador-Mlilia et sur Al Hoceimah, et plus loin sur Tétouane et Tanger. Trois types d’agglomérations touristiques peuvent ainsi voir le jour dans cet espace :

les noyaux et centres urbains qui jalonneront la rocade méditerranéenne et notamment au croisement des bretelles qui devront lier cette rocade à la route régionale 610, d’un côté, et à la côte, de l’autre.
les stations balnéaires qui pourront se développer à la faveur des plages qui s’égrènent le long du littoral, tout particulièrement celle de Sidi Driss au potentiel important, ainsi que celle de Souani au débouché de l’oued Nakkor.
les points de débarquement de pêcheurs qui seront aménagés sur la côte et qui fourniront l’opportunité aux touristes et aux estivants d’acheter et de consommer du poisson frais sur place.

C’est dans cette optique qu’il est nécessaire d’aménager les plages en considérant leur potentiel d’accueil réel afin de sauvegarder des sites rares et précieux. C’est aussi dans ce sens qu’il faudra préparer des aires de camping équipées pour accueillir les vacanciers, notamment les MRE qui pourront ouvrir le chemin pour les touristes étrangers.

La localisation géographique, aujourd’hui handicapante, dans la situation d’enclavement où se trouve la zone, faute de moyens de communication, pourra se révéler assez avantageuse lorsque le réseau routier sera amélioré, ouvrant la zone aux flux extérieurs. Ceci transformera le secteur de Boudinar-Tamsamane en véritable arrière-pays touristique d’Al Hoceimah, foyer de tourisme important, disposant d’un aéroport fréquenté par les charters, et donc pouvant fournir une clientèle importante pour cet arrière-pays.

De même, l’aménagement de ce réseau routier favorisera le tourisme généré par les MRE, particulièrement nombreux dans cette zone, parallèlement au tourisme de transit empruntant la rocade méditerranéenne.

·     La petite industrie et l’artisanat

La relance de l’activité agricole sur des bases nouvelles, notamment par le biais de l’irrigation avec la multiplication de petits périmètres, est susceptible de dégager une production diversifiée capable d’animer des unités de transformation ou de conditionnement des produits alimentaires.

Par ailleurs, l’intensification des flux de circulation consécutivement à l’amélioration du réseau de transport et au développement du tourisme et des échanges commerciaux, auront pour conséquence la multiplication des activités d’artisanat, de réparation et de service, ce qui milite en faveur de l’aménagement de zones d’activité polyvalentes dans les centres actuels et les noyaux émergents. Cet artisanat moderne, ou traditionnel bénéficiera sans doute du mouvement de construction et des besoins divers que cela entraînera.

Conclusion

Zone franchement surpeuplée, l’espace de projets de Boudinar-Tamsamane devra connaître une importante diminution de la population rurale, d’une part, et une urbanisation soutenue, de l’autre. Un large programme de désenclavement devra intervenir incessamment, parallèlement à un programme vigoureux de reforestation et de lutte contre l’érosion. Plusieurs équipements sociaux, culturels et économiques sont attendus pour sous-tendre la promotion et le développement de cet espace non dépourvu d’atouts.

L’impact positif de l’ensemble des projets examinés ci-dessus sera davantage amplifié si la révision de la carte administrative arrivait à revoir l’actuel découpage et ériger le tandem Boudinar-Tamsamane, à moyen terme, en chef-lieu d’une future province ; ce qui permettra de concrétiser le principe de la gestion de proximité des hommes et du territoire, tant nécessaire pour cet espace de projets, le tout dans l’optique de mieux gérer l’existant, de créer de l’emploi et des richesses et d’intégrer convenablement la zone dans son environnement régional et national.

MédiocreMoyenBienTrès bienExcellent
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