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Les enfants de la caserne

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Notre école était synonyme de caserne, c’ était la caserne elle-même
Nos petites têtes, pleines de poux et de drame, portaient des yeux ,au guet, grand ouverts, cherchaient un avenir improbable, il n’y avait pas de yaourt ni de chocolat, en fin très peu, pas d’habits portant une griffe, la moindre griffe.

Pourtant les Bel aïd, Slimane, et les autres qui nous ont précédé, s’habillaient déjà made in USA, seulement Dior n’avait rien à rajouter puisqu’il s’agissait tout simplement d’un sac de farine prêt à porter.

Comme des petits soldats, nous exécutions l’ordre du jour du maître: debout ! Assis ! Debout ! Assis…on nous dressait (éduquait)pour augmenter nos processus attentionnels, ou peut être pour nous aider à se débarrasser des cauchemars de la nuit qui nous paraissaient comme une éternité.

Nous accompagnons nos journées, ponctuées par des repas sans goût sans âme et sans préliminaires gustatives à titre d’entrée; ni prières à exaucer; on mangeait point barre.

Les légumes il y en avait ; selon les saisons, quant aux fruits , la plus part des gens n’avait que des pêches nocturnes ;à rêver, pas à croquer comme une pomme au Paradis .

Pour les fruits exotiques; au moins, il y’avait un avocatier sis ferme de Maurice, plus tard «exilé» à Mulhouse.

A croire l’Ignorant(AJJAHAL)qui raillait en nous disant que les autochtones lançaient les avocats vers le singe de Maurice, titre aujourd’hui attribué à un riverain converti en détaillant de légumes .c’est après que  j’ai réalisé qu’exotique ne veut rien dire ,chaque culture en voit l’exotisme en l’autre.

Heureusement que chacune de nos maisons, était refuge aux autres, en fait, il n’y avait pas l’autre , on faisait qu’UN .On dirait une colonie spongiaire.

La vie en commun était la devise pour vaincre la dèche, les gens se métamorphosaient en meutes de loups affamés par un temps de givre et de misère. Et il y’avait un soutien de plomb pour toutes nos tables basses, naines comme des Bonsaï:des théières à ventre gonflé tel un enfant sous alimenté, à tête vide de rêves et de souvenirs : Le monde était calme, enfin apparemment!
Ces théières avaient une capacité de dix (10) gigas OC thé,

Toute notre génération avait ce syndrome d’addiction au thé, à la menthe très bon à sentir .ou à entendre, telle une mini cascade d’Almarjia ; quand le bec verseur lâche sa dose aux verres accros à la théine.

Plus tard , on lisait que la réponse venait de la fenêtre; mais tous les pâtres que je connaissais étaient incapables de distinguer un Alif d’un bâton de zebbouj (Oléa sauvage).

C’était vrai au temps des prophètes, ou alors on était encore petits pour le savoir…
quelques années passées; et nous voilà entrain de bien lire mais on ne comprenait pas beaucoup de choses; heureusement, il y avait des images qui nous aidaient à prolonger le réel par l’imaginaire:je me souviens on allait même à la lune accompagnés d’un âne, pourtant nous n’ étaient pas tous des cancres.

Tel un coup de pied dans la fourmilière, la cloche de la caserne(l’école) nous projetait dans les quatre sens du village, par petits groupes on rentrait,
Le long du chemin incrusté dans nos schémas mentaux comme des souris de laboratoire qui arrivent à décrocher la récompense.

Pour nous la pastille était la série (le set) de verres de thé et du pain 100 % bio.

Et la lumière fût: on arrivait à lire des lettres qui venaient de loin et même des chiffres qui nous intéressaient tant:l’oseille, tout le monde aimait en avoir ; les vacanciers ; les boucs comme il les appelait feu Chraïbi; écrivaient, ou plutôt,dictaient: » Nassib mina darahim » C.A.D ,une part d’argent.

Ahfir d’antan. La rfissa:les Ftira farcies à la graisse et à la « Magramane »; les crêpes pas tout à fait bretonnes, car on manquait de vaches et de brousse tels Les Landes du Morbihan; mais les femmes avec un grand F, arrivèrent à réussir des crêpes loin du mauvais oeil d’un mâle viril, on dirait un loup affamé, aux yeux rouges qui  attendait la première crêpe pour l’avaler, sans dhan(beurre) ni huile ni Bismillah.

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2 Comments

  1. PIGEON MRE
    25/09/2010 at 22:44

    Je me rappelle bien de « BIEN LIRE ET COMPRENDRE », heureusement ils y’avaient les images pour pas comprendre, mais comme si on regardait des dessins animés avec notre propre scénario.
    En tous cas Bravo, j’ai bien aimé ton récit.

  2. Minouch
    25/09/2010 at 22:44

    Merci pour ce récit. Cette force d’écrire et ce méssage, bienque crypté, mais qui atteigne toute personne decidée d’avoir vecu cette promenade, comme vous l’aviez décrite; me laissent encore croire, qu’on aura d’autres CHRAIBI entre nous dans ce bled de rfissa et ftira.
    Merci bequcoup, ca m’a vraiment emu! Bonne continuation!

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