4-L’énonciation: cous de langue suivi d’exercices pour les élèves des premières années du bacalauréat marocain
B- Dans une énonciation mixte, deux énoncés alternent : l’un est ancré dans la situation d’énonciation, l’autre coupé (Les écrits à caractère autobiographique usent de l’énonciation mixte)
Soulignons de deux couleurs différentes l’énoncé ancré et l’énoncé coupé de la situation d’énonciation
‘’Dès que j’eus pénétré leur dessein, je me sentis humilié comme je ne l’avais jamais été et je fis le serment de mourir plutôt que de me prêter à ces manœuvres dégradantes. Cependant, ma honte fut réduite dans de notables proportions, je suis obligé de l’avouer, quoique ma résolution restât ferme, quand je vis la femme que la science m’avait assignée comme compagne. C’était Nova. Je fus presque enclin à pardonner sa sottise et son aveuglement au vieil olibrius et je ne protestai d’aucune manière quand Zoram et Zanam, m’ayant empoigné à bras-le-corps, me jetèrent aux pieds de la nymphe du torrent.’’
La Planète des Singes Première partie ; chap. XVI : Pierre Boulle
Remarque
– L’énoncé ( je suis obligé de l’avouer) est ancré dans la situation d’énonciation. Il renvoie au moment de l’écriture et par conséquent au JE NARRANT (JE écrivant)
Les indices de l’ancrage sont : je ; suis obligé (présent de la voix passive)
– Tout le reste est coupé de la situation d’énonciation. Il réfère à l’époque des faits et par conséquent au JE NARRE (JE actant)
Les indices de l’absence d’ancrage sont : -le passé antérieur : eus pénétré
-le passé simple :sentis humilié(passé simple passif) ;fis ;fut réduite( passé simple passif) ; vis ; fus ; protestai ; jetèrent.
Exercice : Soulignez de deux couleurs différentes l’énoncé ancré dans la situation d’énonciation et l’énoncé coupé.
1-‘’Je me souviens qu’un jour, étant enfant, j’allai voir le bourdon de Notre Dame.
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Tout à coup l’énorme cloche tinta, une vibration profonde remua l’air, fit osciller la lourde tour. Le plancher sautait sur les poutres. Le bruit faillit me renverser ; je chancelai, prêt à tomber, prêt à glisser sur les auvents d’ardoises en pente. De terreur, je me couchai sur les planches, les serrant étroitement de mes deux bras, sans parole, sans haleine, avec ce formidable tintement dans les oreilles, et sous les yeux ce précipice, cette place profonde où se croisaient tant de passants paisibles et enviés.
EH bien ! Il me semble que je suis encore dans la tour du bourdon.’’
Le Dernier Jour d’un Condamné ; chap. XXXVI ; V. Hugo
2- ‘’Elle leva les yeux au ciel et se tut, confondue par tant de niaiserie.
Je crois n’avoir jamais mis les pieds dans un bain maure depuis mon enfance. Une vague appréhension, et un sentiment de malaise m’ont toujours empêché d’en franchir la porte. A bien réfléchir je n’aime pas les bains maures. La promiscuité, l’espèce d’impudeur et de laisser-aller que les gens croient obligés d’affecter en de tels lieux m’en écartent. Même enfant, je sentais sur tout ce grouillement de corps humides, dans ce demi-jour inquiétant, une odeur de péché. Sentiment très vague, surtout à l’âge où je pouvais encore accompagner ma mère au bain maure, mais qui provoquait en moi un certain trouble.
Dès notre arrivée nous grimpâmes sur une vaste estrade couverte de nattes. Après avoir payé soixante-quinze centimes à la caissière nous commençâmes notre déshabillage dans un tumulte de voix aiguës, un va-et-vient de femmes à moitié déshabillées….’’
La Boîte à Merveilles ; chap. I ; A. Séfrioui
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