Les ministres marocains déclarent leur patrimoine
Le gouvernement de Benkirane espère afficher non seulement de nouveaux visages, mais également de nouvelles pratiques destinées à gagner la confiance du public.
[AFP/Eric Piermont] Le rôle des responsables gouvernementaux est de servir l’intérêt public, non d’amasser des richesses, selon le Premier ministre marocain Abdelilah Benkirane.
Pour la première fois dans l’histoire du Maroc, plusieurs ministres ont publiquement déclaré leur patrimoine. Le Premier ministre Abdelilah Benkirane a demandé aux membres de son équipe de montrer l’exemple dans le cadre des efforts de moralisation de la vie publique.
Les ministres du Parti pour la justice et le développement (PJD) ont été les premiers à répondre à cet appel.
Les membres de ce parti islamiste au pouvoir ont transmis à la presse la liste de leurs biens, à commencer par leurs comptes bancaires, puis leur patrimoine immobilier, leurs véhicules et les crédits contractés.
Le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement Mustapha El Khalfi a expliqué que cette mesure permettra de mettre en place une nouvelle culture dans la gestion des affaires publiques.
Un dahir (décret) fixe le délai de déclaration à 90 jours à compter du jour de la nomination des ministres. Cette déclaration concerne également les enfants mineurs des ministres ainsi que leurs chefs de cabinets. Une deuxième déclaration devra suivre après trois ans, et une troisième à la fin du mandat.
Selon El Khalfi, l’objectif est d’éviter que les postes de responsabilité ne soient une source d’enrichissement illégal ou d’utilisation abusive du pouvoir pour des intérêts personnels.
« Le poste de ministre ne permet pas d’être riche. Ceux qui cherchent à s’enrichir n’ont qu’à choisir une autre activité professionnelle comme le commerce », a déclaré Benkirane lors du premier conseil des ministres, le 5 janvier.
En dépit des critiques qui leur ont été adressées, les ministres du PJD se disent déterminés à adopter une nouvelle approche. Certains ont décidé de n’utiliser les voitures luxueuses de service qu’en missions officielles, préférant recourir à leurs véhicules personnels. D’autres continueront de se déplacer en train.
Le ministre des Affaires économiques et générales et de la Gouvernance Najib Boulif estime qu’il n’y a pas de raison d’utiliser des voitures qui coûtent plus de 800 000 dirhams (71 000 euros) alors que des véhicules de 200 000 dirhams peuvent rendre le même service.
Les responsables du PJD ont indiqué qu’ils conserveront leur propre domicile, sauf ceux qui habitent loin de Rabat. Benkirane a choisi de rester dans sa maison et de n’utiliser la résidence du chef de gouvernement que pour les réceptions officielles.
Bien que le parti au pouvoir ait été taxé de populisme, El Khalfi a maintenu que la position de son parti concernant l’utilisation des biens publics pour des intérêts personnels ne changera pas, expliquant que les ministres de son parti veulent donner aux citoyens des signaux positifs reflétant la politique de proximité.
De plus, les ministres ont signé une charte morale qui comporte un certain nombre d’engagements, dont celui de servir l’intérêt général et non des intérêts personnels ou partisans.
Selon ce document, les ministres doivent respecter le principe de l’égalité des chances sans aucune considération politique, partisane ou familiale. Ils doivent refuser les récompenses, les cadeaux ou les dons en argent ou en nature en contrepartie d’un service rendu. Ils ne doivent pas profiter de leurs fonctions pour réaliser des affaires personnelles. Ils ne doivent pas participer à des transactions, des achats ou des marchés qui impliquent un membre de leur famille ou leurs associés.
Outre les responsables gouvernementaux du PJD, quelques ministres des autres partis politiques alliés ont suivi la même démarche en déclarant leur patrimoine.
L’opinion publique est favorable à cette pratique et espère qu’elle aura un impact positif sur le gouvernement.
Les mois qui viennent montreront si les ministres, notamment ceux du PJD, parviendront à garder la même attitude et à faire changer le train de vie de l’administration publique, a déclaré Karima Lamine, une étudiante.
Par Siham Ali pour Magharebia à Rabat – 29/01/12
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