L’euphémisme, de la poétique à la politique
Zaid Tayeb
La langue a ses petits tours que les hommes de peu de crédit utilisent à des fins peu morales. L’un de ces petits tours que leur offre la langue est l’euphémisme, cette figure de style qui consiste à rendre moins offensante pour l’esprit pur une pensée laide et souillée. On m’a appris, quand j’étais jeune d’esprit et d’apprentissage que je devais dire les choses d’une certaine manière pour ne pas vexer ceux à qui elles s’appliquent. Et dans ce contexte, mes professeurs me faisaient dire ‘’mal voyant, non voyant’’, ‘’ mal entendan, non entendant’’ pour désigner un aveugle ou un sourd. C’était pour moi, à ce niveau de mon apprentissage, beaucoup plus un cours de morale sur la bienséance et la conduite à tenir quand je suis en société, qu’un cours de langue ou de grammaire. Je savaiS à cet âge avancé de ma scolarité que cette tournure portait le nom d’euphémisme et j’essayais de l’employer avec d’autres mots. C’était un joli nom qui servait à dire les choses sans trop de brutalité. En effet, les mots sont violents et on faisait tout pour les rendre plus doux et moins marqués. Jusqu’à un certain âge, j’ai pris la chose par le bon côté car l’usage voulait qu’on doive éviter de ‘’parler de la corde dans la maison d’un pendu’’ et je trouvais élégant de dire ‘’non voyant ou mal voyant’’, ‘’non entendant ou mal entendant’’ dans les discussions où seraient évoqués les aveugles et les sourds. Ceci dit, et de quelque manière que soit, que je dise de l’un ‘’mal voyant, non voyant ou aveugle’’ et de l’autre ‘’mal entendant, non entendant ou sourd’’, je n’enlèverai ni au premier la lumière des yeux ni au second les sons des oreilles. Par la suite, et grâce à des efforts personnels, j’ai élargi mes connaissances en matière d’euphémismes et j’ai découvert que son emploi devait sans aucun doute cacher une réalité moins morale dont on voudrait faire la promotion et que son emploi tendait à être généralisé dans un dessein qu’il convient de clarifier. En effet, l’euphémisme sert actuellement et hors des convenances à dire les choses les plus cochonnes de manière poétique. Ainsi donc, l’occident dit policé, dont dépend une bonne partie de nos connaissances et de notre culture aussi, hélas ! veut nous faire admettre ces choses cochonnes en les revêtant d’une fine couche d’un produit lumineux et doré. Les mots les moins beaux à entendre qui renvoient à des réalités vulgaires et malsaines deviennent des mots et des réalités communes par leur caractère banal que l’on peut utiliser sans risque d’offenser. A titre d’exemple, je vais commencer par citer quelques mots grossiers devenus communs dans l’usage. L’homosexualité, mot d’apparence savant, littéraire ou poétique, n’est rien d’autre qu’un mot vulgaire et grossier qui a, hors de tout emploi à caractère euphémique, un sens qui fait rougir de honte ceux qui ont un peu de sang noble dans les joues. Ainsi, l’homosexualité, mot d’emploi général et généralisé renvoie aux mots qui lui sont para-synonymes ‘’pédérastie’’, ‘’pétasserie’’, ‘’putasserie’, ‘’pédé’’,’’putain, pétasse’ et j’en passe (sauf votre respect). Le lexique courant et marqué de vulgarité est beaucoup plus riche et plus expressif et moins allusif que celui de l’euphémisme qui se dit moins marqué. Or, en principe c’est l’euphémisme qui appartient la langue marquée alors que le lexique courant à la norme. Ce qui en est de la langue française, en est de la langue arabe qui utilise presque les équivalents à la langue française, d’où ‘’mithliya’’1 et ‘’baiat al hawa’’2 pour camoufler tout ce qu’il y a de plus vulgaire dans les mots.
Il ressort de ce que je viens de dire que l’occident pervers et vicieux s’approprie la langue et ses tours pour cacher le côté obscur et malsain de ses desseins de vouloir entrainer la société dans les abîmes de la déchéance.
1-Al mithmiya: المثلية بمعنى اللواطية
2-Bai3at Al hawa:بائعات الهوى بمعنى العاهرات
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