La France, ce pays des grands débats
Yahya Torbi
L’Agora dans la Grèce antique, comme le Forum dans l’empire romain, était une place publique, où se rencontraient les habitants des cités, notamment les philosophes et les intellectuels tels que Socrate, Aristote et leurs disciples, pour parler d’économie, d’art, des sciences mais surtout, de politique, de métaphysique et de religion, sans peur ni contrainte. C’est ainsi qu’est née la liberté de parole et de pensée. Mais il fallait attendre le 26 août 1789, date de la déclaration des droits de l’Homme, et à laquelle la liberté d’opinion et de la presse fut constitutionnalisée. Et, dès lors que les journalistes sont les seuls à mieux comprendre l’indignation, la mélancolie et les préoccupations des citoyens, le journalisme est devenu, le porte-parole du peuple français avant qu’il ne devienne, au fil des années, le contre-pouvoir qui surveille le bon fonctionnement des politiques et qui garantit la progression du processus démocratique. C’est grâce à la presse libre et indépendante, donc, que la société française à été démocratisée de fond en comble et de long en large, et qu’elle continue de se démocratiser, jour après jour et plus vite que quiconque au monde, en fonction du mode de vie des Français, et au rythme de l’évolution de leur pays.
Les journalistes politiques sont l’âme qui anime les débats en France, mais surtout le thermomètre et la jauge, qui mesurent et verifient le degré de démocratisation de la société. Les plateaux de TV français organisent et abritent les débats les plus houleux et les plus osés du monde, et dans lesquels les tabous et les lignes rouges, qui entravent les libertés dans les pays arabes, n’ont pas de place, et les lois liberticides sont carrément transgressées sous le regard du monde entier, alors qu’un simple tweet critiquant une mauvaise gestion d’un responsable politique, en Égypte ou en Arabie Saoudite, pourrait être fatal pour son auteur.
Tous les thèmes sont à l’ordre du jour et toutes les critiques sont permises dans les émissions de télé, à la radio et sur les réseaux sociaux, ce qui envie les écrivains et les journalistes arabes, assoiffés de liberté de parole, d’aller vivre en France, et ce, pour, d’une part, pouvoir exprimer haut et fort leurs pensées, et, d’autre part, éviter la censure, ou pire encore, les poursuites et les jugements arbitraires et donc la prison.
Puisque le destin de la France occupe une place prépondérante dans les débats publics, les personnalités et responsables politiques, toutes tendances confondues: Président de la Republique, ministres ou encore candidats à la présidentielle, sont souvent soumis, au cours des interviews télévisées ou radiodiffusées, à des interrogatoires embarrassants, voire implacables et provocateurs sur les sujets les plus sensibles, qui préoccupent les Francais, de la part des journalistes avertis, qui les taquinent jusqu’au harcèlement moral, en soumettant ainsi la liberté d’expression et de la presse à de rudes épreuves. Non seulement le débat met à nu les politiques menées par le chef de l’Etat et son gouvernement, mais en plus il guette chaque dysfonctionnement et chaque défaillance de ces derniers, en vue de les dresser et de les orienter, afin de les inciter à être plus performants.
Ainsi, à force de discuter de tous les sujets et de débattre toutes les propositions, sans réserve, ni crainte, ni retenue, la France est devenue l’Agora des temps modernes par excellence.
Yahya TORBI
Aucun commentaire